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Friche, oh ma friche

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Vous avez connu les friches industrielles. Voici maintenant venu le temps des… friches tertiaires. Le sujet était au menu du dernier colloque de l’Orie (Observatoire régional de l’immobilier d’entreprise en Ile-de-France). A défaut de réels échanges sur la question, les professionnels ont mis un chiffre sur ce phénomène : plus de 500 000 m2 de bureaux rien qu’en Ile-de-France. « Près de 18 % des surfaces immédiatement disponibles semblent définitivement inadaptées à la demande ». Et encore, ils ont pris un critère particulièrement discriminant en ne retenant que les immeubles vides depuis plus de 4 ans. En abaissant le seuil à 3 ans, ce sont plus de 870 000 m2 de bureaux qui attendent un occupant.

Les causes sont connues. D’abord et avant tout, c’est une mauvaise localisation. Il n’est presque pas surprenant de voir que plus de la moitié de cette vacance prolongée (53 %) se situe en deuxième couronne parisienne. Le fruit d’une politique d’étalement urbain qui coûte 4 Mds€ de PIB à la France, selon l’économiste Laurent Davezies. Certains professionnels auraient dû se méfier. Le premier critère d’un programme immobilier reste l’emplacement, l’emplacement et l’emplacement.

Mais, c’est aussi en raison d’un facteur technologique : la 3e révolution industrielle – celle d’une économie décarbonée prophétisée par Jérémy Rifkin – va accélérer le phénomène d’obsolescence des immeubles tertiaires. L’Orie a fait des projections. Chaque année, entre 140 000 et 240 000 m2 de bureaux pourraient être définitivement inadaptés. D’ici 2030, ce sont potentiellement entre 2,8 et 4,8 millions de m2 de bureaux qu’il faudrait retirer du marché aussi bien pour des raisons économiques que techniques. Et encore, on ne parle que des bureaux construits entre 1981 et 2000 !

Quels remèdes ? Transformer en logement est la solution politiquement correcte. Le hic, c’est qu’une mauvaise localisation reste une mauvaise localisation, pour une entreprise comme pour un ménage. La friche tertiaire au cœur du 7e arrondissement restera l’exception, même l’exceptionnel. L’autre problème, c’est la faisabilité économique au regard des coûts de transformation. L’équation devient souvent impossible dans des zones où la valeur est quasi-nulle. Sans une dose d’EPO, aucun opérateur ne va s’attaquer à une telle montagne. Bonus de Cos, reprise de surfaces perdues en superstructure, dispense de l’obligation de parkings… sont quelques adjuvants proposés par l’Orie pour doper un flux moyen annuel de reconversion de bureaux qui plafonne autour des 50 000 m2 dans la Capitale depuis 20 ans.

La solution la plus pragmatique sur le plan économique serait quand même de raser ces immeubles désespérément vides, à la condition de l’accompagner d’un véritable projet urbain. Le défi est colossal tant le parc obsolète est mité sur l’ensemble du territoire francilien. Ce travail de reconquête urbaine, pas totalement achevé sur les friches industrielles, va maintenant débuter sur le tertiaire. Pour plus de cohérence, il gagnerait à s’inscrire dans le projet du Grand Paris.

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