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Point de vue de Yoann Joubert, Réalités

La France n’a pas besoin de produire 500 000 logements par an

Les orientations gouvernementales récentes vont dans la bonne direction, car elles renouent avec le bon sens et font preuve de pragmatisme.

L’ancienne ministre du logement s’était investie d’une mission politique ; elle s’inscrivait dans un projet mêlant idées reçues et slogans. La nouvelle est dans l’exercice d’une responsabilité ; elle est plus concrète et laisse une place à chacun des acteurs du logement, sans opposer à longueur de temps l’intérêt des particuliers et ceux des professionnels.

C’est un tournant majeur, un retour à la cohérence de nature à redonner le moral aux acteurs économiques. Ceci dit, ce tournant ne sera pas immédiatement suivi de l’effet puissant attendu, pour plusieurs raisons :

> Les élus locaux ont la main sur les PLU et les autorisations d’urbanismes. Or, beaucoup d’entre eux sont devenus soit anti-construction depuis les dernières élections municipales, soit ultra sociaux brisant l’équilibre global de la production d’immobilier neuf. Les élus locaux détiennent les clés de la construction mais, trop souvent, ils ne s’en servent plus à bon escient.

> On annonce depuis 5 ans des ajustements sur les normes qui ne viennent jamais. Le discours est ancien, les premières annonces remontant au gouvernement Fillon. Pourtant, depuis, la pression s’est encore accentuée sur les prix de revient de la construction. Des paroles aux actes, il y a un monde et jamais autant qu’aujourd’hui les mots du sociologue britannique John Austin – « Quand dire c’est faire » – ne se réduisent à rien de plus que la prononciation d’un mariage dans une mairie ! Il vaudrait mieux « faire plutôt que dire » en cette période difficile.

> L’immobilier est un métier à très forte inertie. Un projet dure 5 ans ! Un nouveau foncier, une fois le permis de construire obtenu, aboutit au lancement commercial du programme au bout de 6 à 12 mois, qui lui-même aboutit à un chantier encore 6 à 12 mois plus tard. Aucune modification urbanistique ou technique n’aura un impact rapide sur le marché, que seule une incitation simple et forte peut transformer à très court terme.

> Surtout, le marché immobilier présente un déséquilibre structurel évident entre l’offre et la demande. Le cycle bas a commencé en 2007/2008. Il faut d’abord qu’il se rétablisse sur des fondamentaux sains avant que le marché n’apporte la croissance attendue par le pays.

> Le niveau actuel des ventes reste assez élevé par rapport aux moyennes historiques de long terme. Il existe un tropisme lié aux années exceptionnelles de la profession, lesquelles avaient déstabilisé le marché. Si l’on n’y prend pas garde, le nombre annuel de ventes pourrait encore largement baisser.

> Enfin, le pays n’a pas besoin de produire 500 000 logements par an et aucune orientation politique ne pourra forcer les clients à acquérir des biens s’ils n’en ont pas le besoin.

C’est pourquoi, chez Realités, nous pensons depuis longtemps que le marché se régulera tout seul si on lui laisse le temps de s’assainir et, surtout, si on lui garantit un écosystème (politique, normatif, fiscal) durablement stable.

En conclusion, le nouveau discours gouvernemental donne envie, c’est déjà ça. Nous saurons en tirer le meilleur parti avec énergie et détermination.

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