Business Immo, le site de l'industrie immobilière
Cécile Rouquette-Terouanne, cabinet Cornet Vincent Ségurel

[POINT DE VUE] Loggia et Loi Carrez

La Cour de Cassation a récemment eu l’occasion de rappeler les conditions dans lesquelles une loggia d’un appartement pouvait être intégrée à la superficie privative de celui-ci, objet d’une transaction, et partant pouvant faire l’objet d’une valorisation économique tangible. La position exprimée par la 3ème Chambre civile n’est pas nouvelle mais cette dernière a souhaité, par la mention de l’arrêt qui a vocation à être publié, rappeler l’importance de celle-ci (Cass. 3ème civ. 28 janv. 2015 : n°13-26035).

1. Selon l'article 4-1 du décret n° 67-223 du 17 mars 1967 

« La superficie de la partie privative d'un lot ou d'une fraction de lot mentionnée à l'article 46 de la loi du 10 juillet 1965 est la superficie des planchers des locaux clos et couverts après déduction des surfaces occupées par les murs, cloisons, marches et cages d'escaliers, gaines, embrasures de portes et de fenêtres. Il n'est pas tenu compte des planchers des parties des locaux d'une hauteur inférieure à 1,80 mètre. ».

Et l'article 4-2 du même décret ajoute : « Les lots ou fractions de lots d'une superficie inférieure à 8 m² ne sont pas pris en compte pour le calcul de la superficie mentionnée à l'article 4-1 ».

La loi ne s'applique donc pas aux lots ou fractions de lots inférieurs à 8 m² ni aux locaux non clos et couverts.

La Cour de cassation a considéré que, dès lors que la vente portait sur un appartement constitué par la réunion de plusieurs lots dont la partie privative de certains avait une surface inférieure à 8 m², il y avait lieu de retenir la surface totale de l’appartement, tel qu’il se présentait matériellement, les lots d'une surface inférieure à 8 m² n'ayant pas à être exclus du calcul de la superficie.

La notion d’unité d’habitation prévaut donc (Cass. 3ème civ., 13 avr. 2005, n°03-21.004 : Juris-Data n° 2005-028018).


2. S’agissant de la notion de « locaux clos et couverts »

Il convient de prendre en compte le bien tel qu'il se présente matériellement au moment de la vente, pour autant que l’ensemble puisse être qualifié de partie privative.

En effet, la loi Carrez n'est applicable que si les locaux ainsi aménagés constituent une partie privative et non pas une partie commune à usage privatif (Cass. 3ème civ., 18 sept. 2012, n° 11-19.884 ; Cass. 3ème civ., 9 avr. 2013 : n°12-15.408).

S’agissant précisément d’une loggia, un arrêt récent a donné des éléments intéressants d’appréciation de son caractère privatif :

  • La loggia est expressément désignée dans la composition du lot vendu,
  • Ce local est clos et couvert et ne comporte aucune rigole d'écoulement des eaux de pluie qui ne peuvent pénétrer dans la « loggia », 
  • Compte tenu de sa configuration matérielle, qui n’est ni un lieu d’accès ni un lieu de passage de cet appartement, permettant son usage exclusif par le copropriétaire du lot auquel elle est incorporée, la loggia constitue une partie privative. (CA Versailles, 20 nov. 2014 : Juris-Data n° 2014-033474).

Aussi si ce bien n'est plus un « abri non clos » mais qu'il a été transformé en local à usage d'habitation par le vendeur, sa superficie doit entrer en compte pour l'application de la loi Carrez (Cass. 3ème civ., 6 sept. 2011, n° 10-19.542).

En revanche n’est pas close une loggia présentant des ouvertures dépourvues d’isolation ainsi que des trous permettant l'évacuation naturelle à l'extérieur des eaux pluviales (Cass. 3ème civ., 18 sept. 2012, n° 11-18.762 : Juris-Data n° 2011-005383).


3. La Cour de cassation a eu tout récemment l’occasion de confirmer sa position

La Cour de cassation confirme sa position consistant à retenir que, dès lors que la loggia est (1) une partie privative et (2) close et couverte, elle doit être intégrée au calcul de la surface privative quand bien même sa superficie serait inférieure à 8 m².

En l’espèce, les loggias litigieuses étaient expressément désignées dans le lot vendu.
Elles étaient, à la date de la vente, fermées et rendues habitables, de sorte qu’elles étaient matériellement intégrées à l’appartement

Aussi la 3ème Chambre civile approuve la Cour d’appel de Poitiers (2 août 2013) d’avoir rejeté les prétentions de diminution de prix formées par les acquéreurs de l’appartement.

Si les acquéreurs avertis doivent effectivement s’assurer du caractère privatif ainsi que clos et couvert de la loggia intégrée à l’appartement convoité, leurs ardeurs de contestation judiciaire quant à la superficie doivent, à la lumière de cette décision, être réprimées.

Business Immo