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Point de vue d'Aurore Vialatte, IEIF

[POINT DE VUE] Enfin !

Alors que ce mois de novembre 2015 restera marqué par les attentats les plus meurtriers qu'ait connus la capitale française, le retour à des préoccupations plus économiques et financières paraissent pour autant inéluctables en raison de la décision historique de la Fed de relever son principal taux directeur de 25 points de base.

Au cours de ce mois, un changement de paradigme semble s'être produit : les investisseurs ne se préoccupent plus de savoir si la remontée des taux aura bien lieu, mais de son ampleur et de son phasage. Malgré les tensions géopolitiques mondiales, les principales réflexions des acteurs sont bel et bien d'ordre économique : quelle croissance pour 2016 ? Le contre-choc pétrolier est-il arrivé à son niveau plancher ? Quel sera l'impact de la remontée des taux de la Fed sur la croissance mondiale, plus particulièrement sur la croissance des pays émergents ?

Outre-Atlantique, la remontée des taux directeurs de la Fed est désormais réalité, pourtant les statistiques publiées soulignent une certaine fragilité de la croissance américaine. Bien que cette croissance ait été révisée à la hausse à 2,1% en termes annualisés au 3e trimestre (1,5% en 1ère estimation), plusieurs indicateurs montrent un possible essoufflement de la première puissance mondiale. Alors que, du côté du marché de l'emploi, les créations de postes publiées par l'enquête ADP sont meilleures que prévues avec 217 000 emplois créés (contre 190 000 prévus) permettant de conserver un taux de chômage de 5%, les tensions sur le marché du travail mesurées à travers l'augmentation des taux de salaires dans le secteur privé ne se sont pas confirmées. L'inflation n'est que de 0,2% en glissement annuel à fin octobre, s'éloignant de l'objectif de 2%. Toutefois, l'inflation sous-jacente (hors prix de l'énergie et des biens alimentaires) s'établit à 1,3%.


Du côté de l'activité industrielle et des services, les doutes quant à la solidité de la croissance de l'économie américaine se concrétisent. On notera notamment un indice PMI manufacturier de 52,8 en novembre (54,1 en octobre), son plus bas niveau en deux ans, un indice PMI des services de 56,1 (contre 54,8 en octobre), un indice ISM des services de 55,9 en novembre (contre 59,1 en octobre et 58 prévu), et surtout un indice ISM manufacturier de 48,6 en novembre, également son plus bas niveau depuis deux ans.

Sur le marché immobilier, l'évolution est assez contrastée. Tandis que les permis de construire augmentent de 4,1% en rythme annuel sur le mois d'octobre et comptent 1,15 millions d'unités, les mises en chantier déçoivent et atteignent seulement 1,06 millions d'unités soit -11% en rythme annuel (1,19 million d'unités en septembre), son plus bas niveau depuis mars. Le moral des promoteurs vient tempérer l'optimisme ambiant du mois précédent à travers l'indice NAHB qui atteint seulement 62 (après 65 en octobre et 64 prévus).

Cependant, les déclarations des membres de la Fed ne laissent aucun doute quant à leur confiance dans la solidité de la croissance de l'économie de la première puissance mondiale, et ce malgré les tensions dues à la chute des cours des matières premières et aux conséquences possibles. La remontée des taux, désormais actée par les marchés, se fera certainement de façon très progressive afin d'éviter tous chocs.

En Asie, les données continuent d'alimenter les inquiétudes des investisseurs. Au Japon, les commandes de machines ont bondi de 10,7% sur le mois d'octobre (+10,3% sur un an) alors que le marché prévoyait un repli de 1,5%.

Cela pourrait illustrer un léger regain de l'économie appuyé par la révision à la hausse de la croissance du 3e trimestre à 0,3% par rapport au 2e trimestre (-0,2% en 1ère estimation), mais les prix à la consommation reculent, une nouvelle fois, de 0,1% en octobre, le pays n'arrivant toujours pas à sortir de la déflation. Quant aux statistiques chinoises, elles exacerbent un peu plus les craintes des investisseurs. Alors que certaines statistiques paraissent indiquer que les réformes lancées par le gouvernement chinois commencent à porter leurs fruits, d'autres arguent en faveur d'un plus fort ralentissement de la 2e économie mondiale. Ainsi, la production industrielle gagne 6,2% en novembre (contre 5,6% en octobre), les ventes de détail bondissent de 11,2% sur un an (après 11% en octobre) confirmant la transition progressive du modèle économique vers une économie de services. L'inflation s'accélère également avec une croissance annualisée de 1,5% des prix en novembre (1,3% en octobre).

Néanmoins, certains indicateurs témoignent d'un ralentissement plus significatif de l'activité comme par exemple un indice PMI manufacturier à 49,6 (contre 49,8 en octobre et 49,9 attendu), un indice PMI des services de 51,2 (contre 52 en octobre) ou bien encore la chute des bénéfices des entreprises (-4,6% sur un an en octobre après -0,1% en septembre). On notera également le recul de l'excédent commercial, pour le 5e mois consécutif, avec des exportations baissant de 3,7% sur un an, et des importations perdant 5,6% sur un an, permettant d'atteindre un excédent de seulement 54,1 Mds$ (contre 61,6 Mds$ en octobre).

En Europe, la dynamique de la reprise se concrétise un peu plus avec un taux de croissance de 0,3% au 3e trimestre (2e estimation). L'indice PMI manufacturier de la Zone Euro augmente à 52,8 au mois de novembre (52,3 en octobre), tout comme l'indice PMI du secteur des services qui atteint 54,2 (contre 54,1 en octobre) pour la Zone Euro. La France confirme le sursaut du mois précédent avec un indice PMI manufacturier de 50,6 (stable) et un indice PMI des services de 51 (contre 52,7 en octobre). Le chômage recule légèrement à 10,7% en octobre pour l'ensemble des pays de la zone excepté pour la France (10,8%). Cependant, l'économie française montre de véritables signes d'amélioration, ce qui augure d'une vigueur plus significative de la croissance en 2016 notamment grâce à une amélioration probable de l'investissement des entreprises. Du côté du moral des acteurs, la situation s'éclaircit avec un indice IFO du climat des affaires en décembre à 109 (contre 108,2 en novembre) et un indice du sentiment économique ZEW des investisseurs pour la Zone Euro qui se rétablit à 33,9 (après 28,3 octobre). A cela, s'ajoute un niveau d'inflation de 0,1% en novembre en termes annualisés (stable par rapport à octobre) ayant poussé la Banque Centrale Européenne à renforcer son programme d'assouplissement quantitatif : baisse de 10 points de base de son taux de rémunération de dépôts (-0,3%), inclusion des obligations émises par les collectivités locales dans le programme, prolongation du programme jusqu'à fin mars 2017. Afin de rassurer les investisseurs déçus par le manque d'ambition du programme, le président de l'Institution a indiqué qu'il se réservait la possibilité d'accroître ce dernier si cela s'avérait nécessaire.

Les indices immobiliers européens ont souffert un peu plus que les marchés financiers et atteint des performances mensuelles moindres que celles des indices de référence. En effet, l'indice de performance globale Euronext IEIF REIT Europe a perdu 2,1% sur le mois de novembre, tandis que l'indice Dow Jones Stoxx 50 affiche un gain de 2,5%. L'indice Euronext IEIF SIIC France a reculé de 1,5%, alors que l'indice CAC 40 gagne 1,3% en novembre. Toutefois, depuis le début de l'année, les performances des indices immobiliers rejoignent celles des indices de référence.

 

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