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Point de vue de Laurent Escobar, directeur associé du bureau d’études Adéquation

Quelques vérités à méditer sur l’ancien pour bien cibler les programmes neufs

À Azé dans la Mayenne, le maire a eu cette idée originale : plutôt que de construire un nème lotissement, restructurons celui que nous avons bâti il y a bientôt cinquante ans, aujourd’hui sous-occupé et qui commence à se dégrader sérieusement. Cette initiative rare a de quoi faire réfléchir.

Dans les secteurs périurbains où se loger devient difficile, combien d’élus se demandent si la solution ne se trouve pas dans l’ancien autant que dans le neuf ?

La question mérite d’être posée. Pensons aux 30 % de ménages aux revenus modestes, en début de parcours résidentiel, qui n’ont pas les moyens d’accéder au neuf. Une fois rénovés voire restructurés, les logements anciens peuvent généralement être remis sur le marché à des prix abordables, laissant la promotion immobilière se concentrer sur les ménages des 3e à 5e déciles, qui constituent son cœur de cible. 

Un autre intérêt du parc ancien est sa forte proportion de grands logements, datant d’époques où la taille moyenne des ménages était plus élevée qu’aujourd’hui. On y trouve les logements familiaux auxquels les élus sont souvent attachés (à tort ou à raison), qui sont si difficiles à vendre dans les programmes collectifs neufs. Ils peuvent aussi être divisés en petits logements, pour lesquels la demande est forte.

Avant de programmer la construction de logements neufs, la collectivité devrait donc examiner soigneusement la structure, l’état et l’occupation de son parc ancien. Elle découvrira souvent que, plutôt que de se focaliser sur la production exclusive de logements neufs qui risquent de ne pas trouver leur clientèle, il sera plus judicieux de diriger en partie l’action foncière vers la rénovation et le redécoupage de logements anciens dégradés. Il va de soi que cette approche est également favorable à la qualité urbaine et à la réduction de la précarité énergétique.

Dans le neuf, attention à ne pas refaire les erreurs du passé

L’exemple d’Azé illustre un autre phénomène à méditer. Nombre de lotissements périurbains connaissent aujourd’hui une évolution comparable à celle des tristement célèbres copropriétés dégradées. Elle s’explique par la même erreur de conception originelle. Ces opérations “monoproduit” ont vu arriver en même temps une génération de propriétaires occupants en fin de parcours résidentiel. Avec l’âge, ils ont perdu les moyens financiers ou la motivation de rénover leur bien. L’ensemble s’est dégradé, rendant la revente de plus en plus difficile alors que, leurs enfants partis, ils se verraient bien acheter un logement plus petit.

Deux erreurs sont donc à éviter dans la programmation de logements privés neufs :

-        Lui faire porter des objectifs qui seraient mieux atteints par l’ancien rénové,

-        Concevoir des programmes monolithiques en accession, ciblés vers les ménages en fin de parcours résidentiel.

La diversité de l’offre doit être l’objectif prioritaire, en veillant à bien représenter les produits de début de parcours résidentiel. Ils garantissent la mixité sociale et générationnelle des premiers arrivants, mais aussi celle de leurs successeurs, qui les remplacent rapidement. La rotation rapide des occupants favorise une rénovation continue du bâti, dont les effets se font sentir dans l’ensemble du voisinage.

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