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Une autre voie pour soutenir l'investissement immobilier

En plein essor, le crowdfunding immobilier emploie volontiers l’expression « investissement immobilier » pour capitaliser sur l’engouement traditionnel des Français pour la pierre. Or, pour être exact, il faudrait plutôt parler de placement immobilier car, dans le strict respect de la réglementation actuelle, les plateformes ne peuvent proposer que cela : placer son épargne à la disposition d’un promoteur qui endossera seul la responsabilité de l’opération ainsi financée.

Les participants ne sont donc pas des investisseurs au sens où ils ne possèdent pas un actif immobilier mais seulement un titre de créance. Ainsi, les responsabilités, les risques mais aussi les rendements – quoiqu’ils demeurent encore bien supérieurs à d’autres types de placements – restent dès lors limités.

À l’inverse, certains n’hésitent pas à abuser du terme crowdfunding pour désigner des opérations qui ne sont ni plus ni moins que des transactions. L’acquisition du bien se fait au travers d’une SCI, qui n’est pas constituée, comme c’est l’usage, de parents ou d’amis, mais d’une communauté d’inconnus. Les membres d’une SCI étant solidairement responsables des dettes jusque sur leurs biens personnels, on comprend qu’un tel montage soit extrêmement risqué puisqu’on ne connaît ni le profil ni la solvabilité de ses partenaires.

À l’heure actuelle, on a donc le choix entre « n’être pas assez propriétaire », ou « ne l’être que trop ». Pourtant, il existe une voie intermédiaire, qui constitue un véritable investissement et qui pourrait passer par le crowdfunding immobilier. Il s’agit d’acquérir collectivement les parts d’un projet sélectionné par une plateforme, qui n’agit plus dans ce cas en tant que simple intermédiaire mais en vrai professionnel de l’immobilier apportant tout son savoir-faire.

En particulier, elle assure elle-même – ou en partenariat avec un spécialiste de la gestion d’actifs immobilier – la location, l’entretien et la valorisation du bien, libérant l’investisseur de ce tracas et de cette responsabilité. En revanche, dans ce schéma, ce dernier est bel et bien propriétaire : son bénéfice ne se matérialise pas sous la forme d’une rente, mais d’un rendement locatif complété de l’éventuelle plus-value réalisée à la cession du bien.

Ce modèle est développé avec succès dans d’autres pays et les pouvoirs publics auraient grand intérêt à l’autoriser en France. Il suffit pour cela d’établir un cadre juridique et fiscal permettant de sécuriser l’investisseur en exigeant des plateformes qu’elles fassent la preuve de leurs compétences et de leurs capacités à remplir des obligations clairement définies. Par ailleurs il faudra exiger que le montage soit assez simple pour être accessible au plus grand nombre, car c’est bien là l’essence même du financement participatif.

En crowdfunding, le projet étant retenu avant de lancer la collecte de fonds, ce mode d’investissement serait d’une part complémentaire dans le principe aux SCPI qui à l’inverse, disposent des fonds des épargnants et cherchent les projets à leur allouer et d’autre part, en ligne avec l’esprit originel du crowdfunding, où la perspective financière se double toujours du désir d’oeuvrer à un projet auquel on croit ou que l’on souhaite voir aboutir.

Contribuant ainsi à désamorcer en partie les risques spéculatifs liés aux très fortes sommes levées par les SCPI, ce modèle offrirait en outre une excellente option aux collectivités qui peinent parfois à financer des projets socialement utiles mais insuffisamment attractifs pour les grands investisseurs : établissements d’enseignement, équipements sportifs et culturels, hôtels d’entreprise, infrastructures liées aux énergies renouvelables, préservation du patrimoine…

Méconnu du grand public, nécessitant un ticket d’entrée élevé, le marché de l’investissement immobilier à vocation professionnelle est aujourd’hui réservé à une poignée de professionnels et le « crowdinvestissement immobilier » constituerait un excellent moyen de l’ouvrir plus largement aux particuliers épargnants.

Il n’est pas de développement économique sans bâtiments pour accueillir l’activité. Favoriser l’investissement primaire dans la pierre professionnelle, c’est poser les fondations de l’avenir. Et mobiliser pour cela les petits porteurs, c’est tout à la fois s’ouvrir des ressources massives et donner un sens à l’épargne populaire.