Business Immo, le site de l'industrie immobilière
Point de vue de Gabriel Matar & Stéphane-Jean Lacroix, Sentinel Hospitality

Paris : 700 € de différentiel de prix moyen dans la catégorie « palace » à Paris, une distinction qui prête à confusion ?

© DR

Depuis 2010 et à l’horizon de 2020, le marché du luxe à Paris aurait fondamentalement changé de visage. En 2010, le petit groupe d’hôtels les plus exclusifs de Paris avait des performances relativement homogènes. La différence de RevPar (« Revenue Per Available Room », soit le revenu par chambre disponible) entre le premier du panel et le dernier était d’à peine une centaine d’euros. Entre 2010 et 2019, les ouvertures et les chantiers de rénovation voient le doublement du nombre de chambres et marquent le renouvellement de l’histoire de l’hôtellerie de luxe de Paris.

Si la demande semble croître à un rythme soutenu, les 8 % d’augmentation de l’offre sont des signaux qui pourraient sembler inquiétants. Toutefois, cette suroffre n’a pas laissé place à une guerre des prix, mais plutôt à une nouvelle segmentation, voire une fragmentation dans le propre segment exclusif du classement « palace ». 

En 2019, force est de constater que le marché des hôtels classifiés « palaces » est désormais complètement fragmenté. Entre le premier palace de ce groupe et le dernier, il existe désormais plus de 500 € de différence de RevPar. Les différentiels de prix sont également sans appel : à peine plus de 700 € en prix moyen pour les derniers et près de 1 400 € pour le meilleur, soit un différentiel de 700 €, du simple au double, traduisant un classement « palace » devenu trop large. Ainsi, il n’existe plus un seul segment de prix mais plusieurs segments aux prix très différents dans la catégorie « palace ». Le segment de l’ultra-luxe, au prix moyen supérieur à 1 000 €, et deux autres sous-segments largement plus exposés à la concurrence de la catégorie 5 étoiles luxe. Il est évident que le prix et le taux d’occupation sont une reconnaissance par les clients de l’exclusivité et de la cohérence de la promesse qui leur est faite dans ce segment aux règles et codes spécifiques. Les spectres de prix dans les autres segments (3, 4 et 5 étoiles) sont moins violents et relativement plus concentrés.

La principale explication de ces différentiels de prix au sein d’une même catégorie « palace », jadis homogène, nous semble liée à l’exclusivité (ou pas) et à la qualité de l’expérience client créées et proposées au sein de chaque établissement.

Au départ de l’expérience client dans l’hôtellerie de prestige, il y a une vision puissante d’un créateur relativement à « l’esprit des lieux ».  L’incarnation et la perception de cette vision n’ont de sens aux yeux des clients que lorsque l’exécution opérationnelle traduit avec succès cette vision fondatrice représentative de l’ADN du projet.

Notre analyse des performances individuelles des palaces parisiens sur les dix dernières années révèle une forte corrélation entre le prix et l’expérience client. Ce sont « l’unicité et l’exclusivité du produit et du service » dans leur exécution opérationnelle la plus pointue au quotidien, que seul le client reconnaît en payant le prix et par sa fidélisation.

Si le client est l’arbitre final des performances réalisées par les palaces, le succès de chaque établissement est l’œuvre d’un visionnaire relayée dans la durée par une équipe. Inéluctablement, la réalité s’impose dans les établissements du classement « palace » qui regroupe plus que jamais une diversité d’établissements, à la valeur du service bien différent, invitant sans doute à une segmentation administrative plus en lien avec la réalité des prix et de l’expérience.  La distinction « palace » n’est plus homogène faute d’avoir tenu compte de l’avis du seul arbitre dans la durée, le client…

Mots-clés : RevPAR