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Avec et sans contact

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Mais qui veut la peau du bureau ? Le lent déconfinement de l’économie française donne l’occasion de joutes entre les partisans et les opposants au bureau à coup de tribunes et autres webinaires. Le télétravail imposé par la période de confinement, doublé des mesures strictes d’encadrement du retour des collaborateurs dans les bureaux imposées par les conditions sanitaires, donne du grain à moudre pour ceux qui s’interrogent sur l’utilité même de l’immeuble de bureau. Dans une tribune aux Échos, Olivier Babeau, président du think tank Institut Sapiens, s’est fait le porte-parole des dirigeants d’entreprise appelant ses salariés à rester chez eux. Ses arguments s’entendent : économie de loyers, de transport, plus grande flexibilité… Ils bénéficient aussi du soutien implicite de quelques grands gourous de la Tech – les grands vainqueurs pour le moment de la crise du Covid-19 – comme le fondateur de Facebook, Mark Zuckerberg, ou le patron de Twitter, Jack Dorsey, qui basculent allègrement dans la « remote company ». 

En bon avocat de l’industrie immobilière, Guillaume Poitrinal lui a répondu dans le même quotidien, arguant de la nécessité des immeubles de bureaux, lieux de « l’hypercommunication » de l’entreprise, mais aussi de la cohésion des équipes et de l’identité des firmes, quelle que soit leur taille. Au-delà de clamer sa joie de revenir au bureau, pour faire plaisir à son bailleur ou se rassurer en retrouvant sa vie d’avant dans le « monde d’après », le patron de Woodeum avance de solides arguments. Sauf un. Le loyer.

Or, c’est bien le nœud gordien de cette affaire. Au lendemain du déconfinement, l’économiste Nicolas Bouzou s’est posé la question : « Pourquoi payer un loyer ? » Il est vrai que si l’on applique à la lettre les règles de distanciation physique, le traditionnel ratio du coût au poste de travail explose, devenant à terme insupportable pour nombre d’entreprises qui ont vu tout ou partie de leur activité dévastée par la crise sanitaire.

On pourrait prolonger la réflexion sur quel loyer payer demain ? Et surtout pour quelle utilisation ? Demain, l’immeuble de bureau ne peut plus se contenter de « stocker » des collaborateurs, mais se doit de faire fructifier le capital humain. Au même titre que la plate-forme n’est plus simplement un entrepôt de stockage des marchandises, mais une véritable « usine » au service de la supply chain des industriels et des entreprises marchandes. À l’instar aussi du commerce physique qui ne peut plus être qu’une vitrine, mais doit offrir un parcours client et même une expérience utilisateur.

Pour revenir au bureau, dont la disparition annoncée n’aura pas lieu, il faudra abandonner les traditionnelles mesures du taux d’occupation et une approche strictement financière pour introduire de nouveaux indicateurs visant à capter la performance de l’environnement de travail. Au bureau comme à la maison.

L’enjeu de ce nouvel immobilier, sans ou avec contact restreint, sera de passer une bonne fois pour toutes d’une logique de coûts à une ambition de performance. La crise du Covid-19 va accélérer ce mouvement déjà engagé chez de nombreux utilisateurs. Le « monde d’après » sera alors de revisiter la chaîne de valeur de l’investissement immobilier qui se repose, encore, sur des cash-flows longs et pérennes.

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