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La logistique urbaine peut-elle révolutionner la distribution de marchandises ?

Nous constatons, depuis une cinquantaine d’années, que le secteur des transports et de la logistique a subi un éloignement forcé des villes. En raison de l’accroissement des populations dans les grandes villes de France, de la pression des coûts du foncier et d’un coût de transport faible, les plates-formes logistiques se sont éloignées des centres-villes. Néanmoins, les problématiques liées à la livraison de marchandises, à l’avènement du e-commerce ou encore aux enjeux environnementaux, entraînent, depuis quelques années, un retour progressif de la logistique au cœur de la ville.

De nombreux engagements sont notamment portés par les collectivités locales dans le domaine des transports et des livraisons de marchandises, repris dans des documents d’urbanisme tels que le Plan Local d’Urbanisme (PLU) de la Ville de Paris ou le Plan de Déplacement Urbain (PDU) de la région Ile-de-France. Ces projets visent à repositionner des outils logistiques dans l’agglomération avec la recherche d’une parfaite intégration au milieu urbain et d’une approche environnementale et énergétique des espaces et des matériels. La logistique urbaine prouve peu à peu toute sa légitimité.

Développer une logistique respectueuse du milieu urbain : un enjeu clé de la logistique urbaine

La logistique urbaine consiste à acheminer dans les meilleures conditions les flux de marchandises qui entrent, sortent et circulent dans la ville. Dans un objectif de respect du milieu urbain et de l’environnement, la logistique au coeur de la ville se veut innovante pour s’insérer au mieux dans le paysage urbain. Ainsi, nous pouvons établir trois niveaux dans la logistique urbaine :

- Les bassins logistiques : Si l’on prend l’exemple de la ville de Paris, le bassin logistique couvre l’ensemble de la région parisienne et au-delà. Il s’agit d’y implanter des plates-formes de logistique urbaine, situées en périphérie des villes, et qui représentent une porte d’entrée des agglomérations pour les marchandises.

- Les zones urbaines denses : elles sont représentées par le coeur des agglomérations où se concentrent la population et les activités économiques. L’objectif est d’y intégrer des hôtels logistiques.

- Les quartiers autour desquels s’organise la vie urbaine locale et au sein desquels la mise en place d’Espaces Logistiques Urbains, notamment dans des parkings souterrains des villes permettra la livraison au plus près des quartiers.

Ces échelles géographiques permettent notamment une mise en réseau des trois niveaux d’intervention, le premier étant la porte d’entrée sur l’agglomération, le dernier permettant la livraison dite du « dernier kilomètre ». Des solutions logistiques paraissent aujourd’hui indispensables, car si les commandes peuvent être dématérialisées, les biens commandés eux, doivent et devront toujours être livrés physiquement. L’objectif est de parvenir à une exploitation optimisée et respectueuse du milieu urbain, grâce à une insertion urbaine exemplaire, à la massification des marchandises pour leur entrée et sortie de la ville, à l’utilisation du fer et de la voie d’eau, à l’exploitation de véhicules propres de livraison, à la mutualisation des espaces et des matériels, ainsi qu’à la taille limitée des sites logistiques urbains. En effet, dans un souci d’intégrer au mieux ces outils dans le paysage urbain, il est important de proposer une taille de bâtiments logistiques adaptée et d’exploiter les espaces souterrains des villes, qui est une manière discrète d’insérer la logistique au coeur de la ville.

La logistique urbaine : une réponse aux nouvelles pratiques de consommation

De nombreuses enquêtes récentes mettent en évidence les pratiques concernant les déplacements de personnes et les comportements d’achats des ménages. Plus de 80 % des achats en hypermarché se font en voiture, quelle que soit la distance à parcourir. Ainsi, pour 15 euros d’achats alimentaires effectués dans un hypermarché en périphérie de la ville, la consommation moyenne d’énergie est deux fois plus importante que s’ils avaient été réalisés dans un supermarché de quartier. On observe alors la raréfaction des petits commerces indépendants, ainsi qu’une baisse d’attractivité des hypermarchés de périphérie (chronophages, peu compatibles avec des valeurs environnementales, etc.). La grande distribution réinvestit donc les centres-villes avec de petites surfaces ouvertes presque 24h/24h tout en développant en parallèle le commerce électronique. On note également une demande de plus en plus forte de livraisons à domicile pour les biens de consommation courante. Cette tendance est notamment liée au vieillissement de la population, à la diminution du taux de motorisation en centre-ville, à un intérêt pour l’achat ludique ainsi qu’à une recherche de gain de temps. Les biens de consommation achetés via Internet ont également évolué : les consommateurs n’hésitent plus à se faire livrer du matériel imposant, tels que meubles ou appareils électroménagers, ou à échanger leurs biens entre eux. Ces données modifient considérablement la distribution des marchandises, qui doivent être de plus en plus livrées directement aux consommateurs des villes ou aux commerces et supermarchés de proximité.

L’engagement environnemental, social et économique au coeur de la logistique urbaine

La logistique urbaine est non seulement une réponse aux évolutions de consommation de la population et au développement de nombreux secteurs, mais également une avancée en faveur du développement durable. En effet, pour une meilleure acceptation et une meilleure intégration de la logistique au sein de la ville, celle-ci doit se baser sur les trois piliers du développement durable.

En termes d’environnement, la logistique urbaine permet l’utilisation de véhicules propres. Néanmoins, ces actions ne concernent pas que les moyens de transport, mais également les matériels de manutention, à gaz ou électriques. Par ailleurs, l’objectif est aussi de mieux coordonner les transports de fret et de personnes en favorisant le développement des transports publics, du covoiturage et de la mutualisation en matière de logistique urbaine. Toutes ces actions permettent une diminution sensible des émissions de CO2, des polluants et des bruits.

En ce qui concerne le pilier social, l’acceptabilité des bâtiments et de leur exploitation par la population est essentielle. C’est pourquoi les investisseurs et gérants d’outils logistiques se doivent de travailler avec les architectes et de mettre en place des bâtiments qui se fondent dans le paysage urbain. Les professionnels du secteur doivent également faire de la logistique urbaine un tremplin pour l’emploi, permettant de drainer des ressources humaines et offrant une voie d’insertion professionnelle et sociale.

Enfin, au niveau économique, la logistique urbaine a toute sa raison d’être : elle est non seulement rentable pour les professionnels, qui contribueront à mutualiser les moyens et développer des synergies afin de réduire les coûts d’exploitation du « dernier kilomètre », mais elle améliore également l’attractivité du territoire urbain. Aujourd’hui, il convient de mieux faire connaître le rôle et l’intérêt de la logistique urbaine, à travers la mise en place d’informations et de formations portant à la fois sur l’analyse systémique de la ville, l’utilisation d’outils logistiques et les actions envisageables. Les enjeux économiques, environnementaux et sociaux mettent aujourd’hui les pouvoirs publics et les professionnels du secteur en situation de transformer une activité peu valorisée jusqu’ici, en une activité de services à forte valeur ajoutée, et d’inscrire la logistique urbaine dans la dynamique de croissance verte.