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Point de vue de Philippe Taboret

Président de la République du Logement

François Hollande n'a plus que quelques jours avant d'être le Président de la République, à la suite de la passation de pouvoir prévue le 15 mai. Quelques jours donc avant d'être la cible des demandes de tous les secteurs d'activité éprouvés par les circonstances et menacés par les conséquences d'une crise toujours à l'oeuvre.

Dans ce contexte, je voudrais dire ce qui est l'essentiel pour le domaine du logement. L'essentiel tient en deux priorités : solvabiliser la demande et rétablir la confiance. La confiance d'abord. Elle s'est absentée il y a déjà plusieurs mois et le marché en porte les stigmates : globalement, dans le neuf comme dans l'ancien, une baisse d'activité de l'ordre de 30 %, provenant pêle-mêle d'un fléchissement de la demande des ménages, d'un changement d'attitude des prêteurs et d'un retrait des vendeurs, le tout assorti d'un ajustement des prix qui ne se fait pas franchement.

D'où doit venir la confiance? Qu'est-ce qui la fondera? Mécaniquement, il faudra attendre le terme des élections législatives pour que les esprits se posent vraiment et puissent en conscience fonder des projets d'avenir, à commencer par des projets d'accession à la propriété ou d'investissement à condition d’avoir un cadre législatif et règlementaire stable et équitable. Qu'on cesse d'en changer les contours à chaque loi de finances, qu'on cesse de mettre derrière un dispositif fiscal ou financier des réalités mouvantes, des règles du jeu constamment modifiées, parfois sans aucun avertissement, sans non plus de consultation des acteurs. Le logement a un besoin vital d'horizon droit et dégagé.

Sur le fond des décisions, la première préoccupation du nouveau Président de la République doit être de resolvabiliser. Deux moyens : utiliser les aides avec parcimonie, pour ne pas enrayer l'ajustement des prix en cours, et créer en même temps les conditions d'un accès au crédit satisfaisant. La question de la modération des prix est centrale. Il faut construire des logements et revenir à un fonctionnement de marché normal, sans surchauffe, fluide, avec un équilibre correct entre les prix proposés, dans le neuf comme dans l'ancien, et le pouvoir d'achat des ménages. Enfin, les observateurs du marché du crédit savent quelle menace plane sur nous, la dégradation catégorique de notre note souveraine, les deux agences de notation ayant réservé leur jugement pour cause d'élection se sentant libérées désormais. Il s'ensuivrait une augmentation des taux d'intérêt extrêmement préjudiciable pour l'immobilier et la réalisation des projets des ménages. Ce risque en outre s'ajouterait aux conséquences de la récente action de la Banque Centrale Européenne, qui a prêté des liquidités en abondance aux grands établissements pour que les conditions de financement de la Grèce ou de l'Espagne ne soient plus dégradées encore qu'elles le sont: ces liquidités seront remboursées prochainement par les banques bénéficiaires et une tension sur les taux de long terme est à prévoir par conséquent.

Il importe que le Président déploie tous les efforts pour éviter au pays un abaissement de sa note souveraine. Il importe aussi qu'il s'assure que les prêteurs, par excessive précaution, arguant en particulier des exigences renforcées en fonds propres de Bâle III, ne ferment pas le robinet du crédit aux particuliers... Au demeurant, si elle se révèle réaliste, la stratégie de séparer au sein des banques les activités de marché, jugées à risque, des activités de gestion d'encours et de prêt pourrait rassurer au bout du compte et avoir sur la distribution du crédit un effet bénéfique. Ce point méritera d'être regardé avec la plus haute attention.   Le Président Hollande doit considérer le logement et la vigilance pour un marché immobilier actif et équilibré comme des obsessions de son mandat. Le logement récapitule tous les enjeux pour les Français et les conditionne tous: le travail, la sécurité financière, la protection physique, la sérénité, la dignité, l'équité, et c'est au point que le chef de l'Etat doit vraiment vouloir être le Président de la République du logement.

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