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Point de vue de Jérôme Le Grelle, Convergences-CVL

Faut-il croire à la résilience durable de l'immobilier commercial ?

Comparons les valeurs locatives des bureaux et des locaux commerciaux : les premières fluctuent au gré des cycles de l'économie générale, les secondes restent remarquablement stables. Ceci montre assez la différence structurelle entre ces deux classes d'actifs. Le bureau est un marché d'offre et de demande, où l'utilisateur reste assez mobile pour renégocier son bail ou aller voir ailleurs, à quelques rues de distance, voire dans quartier ou une commune plus éloignés.

Le commerçant, au contraire, n'a que très rarement intérêt à déménager. Il exploite son magasin dans des conditions décentes, ou il ferme. En cas de difficultés, il cherchera d’abord à se maintenir, ayant fortement investi pour créer son fond de commerce. Son activité dépend, en outre, moins de l'économie générale que de la consommation, laquelle a montré une remarquable "indifférence" aux crises successives depuis des décennies. Ces deux particularités distinguent nettement l’immobilier de commerce de celui du bureau et expliquent la résilience tant vantée de l'immobilier commercial aux cycles économiques.

Cette analyse est-elle valable à long terme ? Il paraît peu vraisemblable que la consommation se mette à évoluer sur des cycles courts et fortement contrastés, ou que le comportement des commerçants change, même s’ils négocient de plus en plus les conditions locatives. En revanche, la montée en puissance de l'e-commerce et l'obsolescence de nombreux sites d'ancienne génération tendront probablement à éroder tendanciellement les chiffres d'affaires, susciter des fermetures ou amener les enseignes à renégocier leurs loyers. Tout ceci affectera les valeurs locatives moyennes et renforcera la hiérarchie entre les sites. Les offres nouvelles ne seront pas épargnées, cela est déjà sensible, surtout en situation locale d'excédent de mètres carrés. Globalement, on doit donc s’attendre à un réajustement des valeurs, directement corrélé à la performance réelle des sites.

En bref, tant que la consommation n'est pas touchée, l'immobilier commercial est structurellement résilient aux crises économiques. Mais les évolutions tendancielles du commerce ne mettent pas les bailleurs à l'abri d'un rééquilibrage des valeurs locatives. Sélectivité et anticipation restent plus que jamais de rigueur.

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