Business Immo, le site de l'industrie immobilière
Point de vue d'Elie Smadja

Vers la fin du débat entre internalisation et externalisation des stocks ?

Vaut-il mieux faire construire de nouvelles infrastructures de stockage ou externaliser la gestion des stocks ? Un débat stratégique en logistique, notamment lors de phases, permanentes ou temporaires, de croissance d’activité. Débat dans lequel s’invite désormais un nouvel arbitre, souvent méconnu, et qui présente pourtant de nombreux avantages : le bâtiment industriel démontable.

Pour un acteur économique dont la supply chain constitue un levier stratégique et qui gère ses flux en interne, le premier réflexe est souvent d’étudier la pertinence d’un investissement immobilier dans un nouveau bâtiment sur site ou même acquis à proximité. Mais encore faut-il pour cela disposer du foncier et des ressources idoines. Et surtout décider de les engager dans un tel projet : l’immobilier constitue déjà pour l’essentiel des entreprises le second poste de charges après la masse salariale et bien souvent la première valeur de l’actif au bilan. Pour de nombreux industriels, l’immobilier est un investissement non productif qui est rarement lié à leur cœur de métier. A y réfléchir, le poste bâtiment est au cœur du métier uniquement lorsqu’il devient lui-même le produit commercialisé.

Faire construire une infrastructure engendre donc la mobilisation de ressources financières qui ne pourront pas être allouées aux développements stratégiques. Il n’est plus rare d’assister, en outre, à des projets d’extension qui, du fait des investissements lourds, voire des dérapages consentis dans le poste construction, mettent à mal la mise en œuvre des autres postes budgétaires comme les équipements, les systèmes d’automatisation ou même encore la maintenance des sites.

L’externalisation : un choix à risque et largement dépendant de la stratégie de l’utilisateur

Le second réflexe consiste à externaliser les activités de stockage. Offrant un certain nombre d’avantages dans des cadres logistiques bien précis, cette option se révèle souvent plus risquée qu’il n’y paraît et peut parfois dessaisir l’industriel d’une partie de sa marge de manœuvre. A titre d’exemple, l’interfaçage des systèmes d’information, notamment dans le secteur du e-commerce, entre le site, le bâtiment de stockage et le transporteur représente un enjeu majeur lors du recours à l’externalisation. La perte de contrôle effectif sur le picking, c’est-à-dire la préparation et l’emballage, ainsi que sur les conditions de stockage des produits induit aussi un facteur de risque en matière de qualité rendue au client final, et forcément le cas échéant une perte d’image et une compensation de la non-qualité.

En outre, le manque de maîtrise des coûts ainsi que l’impact écologique des acheminements supplémentaires générés par un lieu de stockage distinct du lieu de production, du fait des ruptures de charges, constituent des freins majeurs. Enfin, les contrats de prestation logistique incluent parfois des redevances fixes liées aux surfaces et/ou volumes occupés en moyenne, les surfaces ponctuelles additionnelles étant souvent fortement majorées, ce qui limite l’attrait d’une externalisation pour faire face à un pic d’activité saisonnier ou ponctuel.

Mais au-delà de ces aspects, il est un facteur parfois rédhibitoire à lui tout seul : la perte de savoir-faire, ou même l’incapacité de sous-traiter un savoir-faire interne hautement spécialisé qui ne trouve pas son équivalent sur le marché. Dans ce dernier cas de figure, la valeur ajoutée stratégique de la supply chain comme facteur de différenciation prend tout son sens, mais impose donc en retour d’assumer l’ensemble des coûts et des investissements du poste immobilier.

Le bâtiment industriel démontable : une voie nouvelle et disruptive

Souvent méconnu, le bâtiment démontable peut se révéler la solution la plus efficiente pour nombre d’industriels. Ce procédé constructif, qui permet de mettre en œuvre des entrepôts ou autres bâtis industriels totalement démontables jusqu’à 40 m de portée libre, 8 m de hauteur et des longueurs de plusieurs centaines de mètres, présente l’intérêt de pouvoir faire construire en quelques jours et louer à sa guise une infrastructure logistique digne de ce nom sur son propre site.

Il constitue donc une solution flexible au niveau financier, sans sortie de cash et au coût lissé sur la période d’exploitation, permettant aux industriels de conserver la maitrise des stocks sur site. Mais aussi à des acteurs de la logistique d’étendre sans aucun risque leur offre d’infrastructures pour prendre de nouveaux marchés ou accompagner des clients en croissance de volumes.

En plus du faible impact sur les capacités de financement de l’entreprise, cette solution est à ce jour la seule qui permette une construction aussi rapide associée à une « variabilisation » des coûts immobiliers.

Au-delà des aspects financiers favorables, les enjeux se portent sur les conditions d’exploitation de tels ouvrages. Dès lors que ces bâtiments industriels démontables sont dimensionnés selon les normes de résistance aux chargements climatiques (AFNOR DTU P06-002, dito NV65) de la zone d’implantation, ce qui est le cas chez quelques constructeurs, et qu’ils sont équipés selon les sujétions fixées par la destination de l’ouvrage et par la réglementation, ils possèdent de facto les mêmes caractéristiques qu’un bâti traditionnel. A ce titre, l’ouvrage présente toutes les garanties en matière de sécurité des biens et des personnes, permettant d’ailleurs de lui étendre les polices d’assurance d’exploitation qui couvrent les autres installations. Il est aussi et surtout un entrepôt à part entière, qui répond à toutes les exigences opérationnelles d’un bâtiment de stockage ou d’hébergement de process.

De nombreux acteurs économiques ont compris l’intérêt du système et sont désormais équipés de dizaines de milliers de m² de ces dispositifs, parfois en une seule implantation. A l’avenir, la perspective de posséder sur un site une infrastructure immobilière à 90% en construction dite « traditionnelle » et de conserver le reste de son espace foncier libre et apte à recevoir, sur des durées plus ou moins longues, des plateformes d’activités ou de stockage démontables, pourrait dessiner les prémices d’une véritable rupture en matière de gestion du poste immobilier industriel.