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Point de vue de Jacques Daboudet, Capifrance

Loi Alur : des amendements nécessaires

Manuel Valls a évoqué le besoin de modifier la loi sur l'Accès au logement et un urbanisme rénové (Alur), affirmant qu'il fallait "corriger ce qui doit l'être". Un point de vue que partage Jacques Daboudet, président du réseau immobilier Capifrance... Explications.

La loi Alur fait l'objet de nombreuses critiques des professionnels du secteur. Quel est votre regard sur ce dispositif ?

Si on doit analyser l’impact de cette loi Alur sur la construction et la dynamisation du marché on ne peut que constater qu’elle n’aura ni permis de relancer la construction de logements neufs ni le marché de l’immobilier en général. Cette loi est également controversée car elle a plutôt tendance à favoriser le locataire au détriment du propriétaire. Qui plus est, les nouvelles restrictions en matière locative ne créent pas plus de logements. Elles finissent simplement par décourager les investisseurs privés. Concernant le neuf, on constate une chute très importante des transactions, près d’un tiers en deux ans et demi. Il y a également un manque de stabilité des lois de défiscalisation. Beaucoup de promoteurs ont retardé ou simplement refusé de lancer des opérations par manque de visibilité. Enfin, avec la volonté de défendre de mieux en mieux le consommateur lors d’une transaction, on a créé un certain nombre de contraintes « administratives » pour l’achat de biens en copropriété qui ralentissent le processus de vente de manière très importante. Tous les documents qui étaient sollicités au moment de la rédaction de l’acte le sont dorénavant à la prise de mandat ou tout au moins au moment du compromis. L’objectif initial était d’éclairer le consommateur mais finalement aujourd’hui il est noyé sous un amas d’informations inutiles qui lui font perdre du temps, et qui surtout augmente le délai de vente.

Quels sont selon vous les amendements nécessaires ?

Dans les choses à amender prioritairement, il y a le plafonnement des loyers. Il s’agit pour moi d’une petite usine à gaz qui a été montée pour définir les loyers médians. Or, s’il peut être nécessaire « d’encadrer » ou plutôt de limiter le prix des loyers dans quelques villes en France, la généralisation du système est absurde. Le problème des loyers est en effet propre à Paris voire à certaines grandes métropole, et encore. Cette généralisation a trop de conséquences. Elle dissuade les bailleurs mais également les investisseurs, puisque la rentabilité des logements sera réduite s’ils se trouvent dans les zones dites à loyer plafonné. Le deuxième point sur lequel il faut réagir rapidement, c’est la relance de la construction de logements neuf. On sait en effet que la vente dans le neuf permet d’assurer la rotation des biens dans l’ancien. La vente de logement neuf est également un des leviers qui redynamise l’économie. Or, aujourd’hui force et de constater que toutes les petites PME qui gravitent autour de la promotion immobilière et de la construction individuelle souffrent énormément. Donc je pense que le gouvernement doit clairement soutenir les mises en chantier en recréant un climat propice au réengagement durable des investisseurs sur le marché immobilier neuf. Autre point concernant le neuf, c’est qu’il faut limiter toutes les contraintes de construction. Là Aujourd’hui il existe bien trop de normes, d’obligation, de procédures... or, ça a enchérit le coût de l’immobilier de 6 à 15% selon les programmes. Il faudrait donc simplifier les choses. Enfin, pour relancer la machine, il faut que l’état qui est propriétaire de foncier dans les grandes villes, là où la demande est forte, libère du foncier pour permettre des promoteurs de construire des logements. Face à la pénurie, il faudrait également permettre de transformer les bureaux en logement. Parce que là encore les contraintes administratives sont très lourdes. Cela permettrait, qui plus est, de relancer le marché de la construction mais également celui des travaux.

Ces amendements seront-ils suffisants pour redynamiser le secteur?

Ils devraient évidemment y contribuer, mais pour relancer le marché, il est essentiel, en parallèle, de redonner du pouvoir d’achat et donc de la capacité d’emprunt aux français. Or, cela passe soit par l’augmentation des revenus (ce qui semble compromis à court terme, au regard de la crise), soit par la mise en place d’aides à l’accès au logement, telles que le PTZ dans l’ancien. En effet aujourd’hui, il y a toute une catégorie de la population française qui est exclue du marché, ce sont les primo-accédant. Ces personnes ne bénéficient pas d’avantages qui les aideraient à devenir propriétaire. Alors peut être que ces aides ne prendront pas la forme du PTZ comme on la connaît. Mais il faudrait reprendre un dispositif équivalent, qui incite, soit sous forme d’économie fiscale soit sous forme d’aides, pour permettre à cette population d’accéder à la propriété.