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[EDITO] La revanche des boutiquiers

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Klépierre vient de chasser EDF du CAC 40, l’indice phare de la Bourse de Paris. Ce « nain », qui fait moins de 1 Md€ de chiffre d’affaires sur les neuf premiers mois avec seulement 1 200 employés, terrasse un géant et ses 73 Mds€ d’activité et 160 000 salariés. Quand on regarde la capitalisation (13,2 Mds€ vs 24,7 Mds€), l’écart se réduit sensiblement.

Klépierre rejoint ainsi Unibail-Rodamco au Panthéon de la Bourse et consacre à l’évidence le statut SIIC, outil de transparence fiscale trop facilement assimilé à une niche fiscale par quelques esprits chagrins ou revanchards. Cette entrée dans le club fermé des grandes entreprises cotées marque aussi le succès d’un modèle qui reste fortement inspiré de la stratégie de sa grande soeur Unibail-Rodamco.

Klépierre s’est ainsi spécialisée dans une classe d’actifs - les centres commerciaux - qui s’est montrée résiliente face à la montée en puissance inexorable du e-commerce, le tout dans un contexte de stagnation de la consommation des ménages. La SIIC a misé sur les grands formats, plus malléables pour tester de nouveaux concepts et permettre à de nombreuses enseignes de s’exprimer.

Klépierre est également une foncière qui a pris le parti de l’international. Dès les années 2000 en accompagnant le géant de la distribution Carrefour sur ses galeries marchandes à travers l’Europe. Plus récemment, en mettant la main sur une foncière scandinave – Steen & Strom – peu avant l’éclatement de la crise financière.

Klépierre est une société conquérante, dont la récente absorption de Corio, propulse définitivement l’ancienne pépite de BNP Paribas de l’avenue Kléber à un bouquet d’une quarantaine de grandes métropoles européennes.

Klépierre est enfin une multinationale, détenue à 20% par le géant américain des centres commerciaux Simon Property, et à plus de 13% par le fonds de pension néerlandais APG, qui vient remplacer une entreprise étatique (EDF est contrôlée à 84,5% par l’Etat) longtemps assise sur un monopole, mais qui n’a pas su transformer les espoirs placés en elle par les investisseurs privés. En témoigne la chute de 46% de son cours de Bourse en cinq ans. Comme quoi, la rente n’est pas gage de performance.

Commentant ce passage de témoin, un journaliste du Monde rappelle cette phrase de Napoléon sur la Grande-Bretagne, cette « nation de boutiquiers », s’inquiétant avec une certaine morgue du jugement que porterait aujourd’hui l’empereur sur son pays. Ce qui d’ailleurs ne manque pas de sel quand on sait que la France, ce peuple d’ingénieurs, a laissé filer Denis Papin et sa machine à vapeur outre-Manche. L’arrivée de Klépierre au Cac 40, c’est en quelque sorte la revanche des boutiquiers.

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