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Point de vue de Laurent Escobar, Adéquation

[POINT DE VUE] Trois erreurs fréquentes, coûteuses et évitables des opérations d’aménagement

Nous avons eu dernièrement à expertiser le projet urbain d’une ville peu avant le lancement de la consultation d’aménageurs. La ville tablait sur un déficit d’opération de l’ordre de 700 000 €. L’étude a démontré que le déficit tendrait plutôt vers 5 M€, mais qu’il était possible, en redéfinissant assez largement le projet, de le ramener au niveau attendu. Mieux vaut tard que trop tard : le projet a pu être remis à plat avant toute contractualisation entre la ville et un aménageur, qui aurait rendu sa révision longue et douloureuse.

Il ne s’agit pas d’un cas isolé, au contraire. Les études préalables aux concessions d’aménagement, bien que coûteuses, peuvent être dramatiquement erronées et contre-productives. Trois erreurs fréquentes expliquent cela.

1. Oublier les habitants


Les études préalables, pour fouillées qu’elles soient, ne comportent en général pas d’étude de marché qui pourrait renseigner le maître d’ouvrage sur les attentes et les budgets des habitants et futurs acquéreurs des logements. Lui et son urbaniste travaillent sur la base d’intentions programmatiques très générales issues d’une commande politique. La forme urbaine découle donc de considérations essentiellement paysagères voire idéologiques. Bizarrement, le projet est dessiné dans le fin détail sans que quiconque se soit demandé si les logements avaient une chance de se vendre ou de se louer.

2. Mal évaluer les recettes


Les recettes tirées de la vente des charges foncières, essentielles dans la détermination du bilan d’opération, sont rarement évaluées de manière précise en amont de la concession d’aménagement. Là encore, il suffit pourtant d’une bonne étude de marché, qui établira les typologies de produit souhaitables et les prix de vente cibles. À partir de là, un dialogue entre l’économiste et l’urbaniste permettra de vérifier la faisabilité du “bon” programme, d’un point de vue à la fois économique et social, et d’en déduire avec une certaine fiabilité les niveaux de charge foncière que l’on peut attendre des promoteurs.

3. Figer les lots à construire


Dessiner le projet dans le détail – au niveau de chaque lot à construire – permet juste de vérifier la faisabilité technique d’un scénario d’aménagement. Si ce scénario n’a pas également été validé économiquement, c’est contre-productif : une étude coûteuse de composition urbaine a été faite en pure perte (sans réelle étude de marché), et elle va maintenant contribuer à figer le projet dans ses erreurs. Il vaut mieux demander à l’urbaniste de représenter les invariants du projet, de vérifier la faisabilité technique d’au moins un scénario qui fonctionne, puis de présenter le projet sous la forme d’un simple schéma directeur d’aménagement. Cela permettra aussi de laisser une place à la créativité des opérateurs immobiliers.

Mots-clés : Projet urbain
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  • Personnes citées

    Laurent Escobar

    Membre du conseil d'administration

    Laboratoire d'Initiatives Foncières Territoriales Innovantes

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