Business Immo, le site de l'industrie immobilière
Point de vue de Jérôme Le Grelle, CBRE-Convergences

Qui créera la valeur de l’immobilier commercial demain ?

L’investisseur, l’enseigne, la collectivité, le consommateur, chacun a sa propre définition de la valeur d’un “bien” commercial. Chacun utilise d’ailleurs pour le désigner un nom différent. Quelle définition retenir ? Aucune, et toutes à la fois.

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C’est l’addition des valeurs appréciées par chacun d’eux  – immobilière, commerciale, urbaine et expérientielle – qui fait la valeur réelle du bien, et pas seulement l’une d’entre elles.

Il est d’autant plus important de s’en souvenir qu’elles sont interdépendantes, chacun étant contributeur à la création de la valeur, pour le meilleur comme pour le pire. Si le consommateur boude, si l’enseigne s’en va, si la gestion du bailleur est défaillante ou si la collectivité prend des décisions pénalisantes, le fonctionnement du site a toutes les chances d’être gravement affecté, et sa valeur de diminuer.

Or deux de nos protagonistes ont bien commencé à rebattre les cartes. Pour le consommateur comme pour l’enseigne de 2017, tel ou tel site commercial n’est plus plus qu’une option parmi d’autres. La multiplication des offres et le développement de l’e-commerce ont fait monter en flèche leur niveau d’exigence… condamnant plus d’un site délaissé à une obsolescence potentiellement sans retour. 

Dès lors que le consensus sur la définition de la valeur évolue, la manière de la créer peut ou doit être réinventée.

Comment ? Justement en reconsidérant le jeu des acteurs pour déclencher de nouvelles dynamiques. En voici quelques exemples, loin d’être limitatifs.

  • Valeur et action publique

Dans les quartiers en difficulté, la collectivité peut redonner de la valeur à ses locaux commerciaux en créant une foncière qui les achète, les commercialise et les gère. À condition que son action soit adossée à une stratégie claire, courageuse et politiquement portée, et qu’elle ne s’apparente pas à de la subvention déguisée. La valeur ainsi générée est à la fois urbaine et immobilière.

  • Valeur et mixité programmatique

Qu’il s’agisse de restructurer des sites existants ou d’en créer de nouveaux, la mixité commerce / services publics / culture / loisirs est devenue incontournable. De nouveaux métiers apparaissent, pour concevoir et construire ces espaces mais aussi pour les gérer, dans une coopération étroite et permanente entre acteurs publics et privés, qui élève la valeur d’usage (expérientielle) de l’ensemble.

  • Valeur et service rendu

Les loyers des centres commerciaux sont la contrepartie des chiffres d’affaires qu’ils permettent aux enseignes de réaliser dans leurs murs. À l’ère numérique toutefois, la dissociation des flux de personnes, de marchandises et de monnaie rend peu à peu caduque la notion juridico-comptable de lieu de vente. Un jour ou l’autre, bailleurs et enseignes finiront bien par redéfinir ensemble le service rendu par centres commerciaux, et sa rémunération, qu’on l’appelle loyer ou autrement. Avec un impact évident sur la valeur financière de l’actif, sans parler des métiers des foncières.

Ces trois exemples parmi d’autres montrent que, dans un environnement fortement évolutif comme l’est celui du commerce, créer de la valeur passe aussi par une profonde réinvention des métiers et des pratiques. Ce qui va bien au delà du gel de la création de tel ou tel type de surface commerciale.