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Point de vue de Gontran Thüring, CNCC

Leçons américaines

© SPENCER PLATT / GETTY IMAGES NORTH AMERICA / AFP

De retour de New York, ou plus précisément de l’événement « deal making » de l’ICSC (International Council of Shopping Centers), quelles leçons en tirer ? Tout d’abord, il serait vain de nier les problèmes de l’immobilier commercial américain. Pour autant, il serait faux de les transposer au continent européen. Rappelons tout d’abord que le marché américain souffre d’une surdensité d’équipements commerciaux. Le nombre de m²/habitant est 10 fois supérieur de l’autre côté de l’Atlantique.

Soulignons ensuite, comme l’a parfaitement démontré un article récent de LSA intitulé le « vrai-faux déclin du commerce américain » que, s’il est vrai que les grands magasins connaissent des difficultés récurrentes et vont fermer des centaines d’unités, d’autres concepts se développent vigoureusement comme les chaînes de magasins de proximité ou à bas prix. Certes, en France la « locomotive » courante des centres commerciaux qu’est l’hypermarché doit se réinventer mais on est loin d’une fermeture de rideaux massive. Il convient enfin de nuancer l’effet du commerce on-line. Les Américains ont parfaitement compris que le débat entre commerce physique et digital n’était plus de mise dans un monde devenu multicanal. L’une des conférences de l’événement était d’ailleurs intitulée « The future of Retail, what’s beyond omni-channel Retail ». L’intervenant, en grossissant quelque peu le trait, considérait que l’avenir du commerce avait d’ores et déjà commencé à se jouer entre l’Alexa d’Amazon et le Google Home !

Deux visites concrètes de magasins ont permis de constater à quel point les lieux de vente ne sont pas (ou sont) en mesure d’être au rendez-vous des consommateurs, selon qu’ils ont compris (ou pas), ce qu’ils en attendaient.

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Quoi de plus décevant que cette librairie qui n’apporte aucun point de différenciation : aménagement sommaire, alignement monotone d’ouvrages, personnel inexistant. On comprend à quel point il n’est pas facile, pour un pure player, de se métamorphoser en commerçant « brick-and-mortar » et qu’il est plus aisé de racheter des chaînes existantes, comme cela a été fait récemment avec Whole Foods. De ce point de vue, on attend avec impatience et curiosité le premier centre commercial physique qu’Alibaba promet d’ouvrir en Chine au printemps prochain sous l’enseigne « More Mall ».

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Nouveau flagship de la marque, l’effet waouh est incontestable, où comment le lieu de vente se transforme en atelier de loisirs créatifs… Ici, on ne vend que de la basket blanche ! C’est au consommateur de la customiser sur place où tout est mis à sa disposition : teinture, lacets, feutres, paillettes… Les clients sont installés autour de grandes tables d’hôtes et vivent dans la bonne humeur une passion partagée. Un vrai lieu expérientiel qui préfigure ce que devra être le commerce physique de demain s’il veut concurrencer les assistants vocaux pré-cités. Bref, le commerce en magasin, et en particulier les centres commerciaux, ont encore de beaux jours devant eux, si tant est qu’ils ne se contentent pas d’être de simples lieux de vente. Dans ce cas, le client (de plus en plus obèse) préférera probablement passer commande sur son canapé !

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