Pas une semaine sans qu’un investisseur français n’annonce une acquisition en Espagne. Pourquoi cette frénésie à vouloir franchir les Pyrénées ?
Au-delà de l’héliotropisme, c’est avant tout la santé économique de l’Espagne qui est saluée. Le « Clotaire » de l’Europe est devenu en quelques années le nouvel « Agnan » de la classe à la faveur de réformes structurelles (et aussi à l’afflux de fonds européens). Des réformes entamées au lendemain de la grande crise financière par de premières mesures d’austérité, poursuivies par une flexibilisation du marché du travail, une diète budgétaire et une réforme des retraites (portée par les socialistes) visant à allonger la durée de cotisation.
Résultat : une croissance de 3,2 % en 2024 et de 2,5 % projetée en 2025. Le marché de l’investissement immobilier, lui, retrouve des couleurs quand d’autres peinent à rebondir. Au 1er semestre, il dépasse les 7 Mds€ et les prévisions des conseils tablent sur un atterrissage autour des 16 Mds€. Peu ou prou le volume d’investissement attendu en France.
Dans les intentions des investisseurs internationaux, l’Espagne devient la deuxième destination européenne derrière le Royaume-Uni. À l’échelle mondiale, elle entre dans le top 5 des pays qui attirent le plus de capitaux étrangers devant… la France. Et d’ailleurs, ce sont les Français qui sont les premiers investisseurs étrangers en Espagne avec 9 % des volumes.
Il y a deux façons de voir les choses.
Se désoler que la France recule inexorablement dans les classements d’attractivité, payant ainsi une instabilité politique, la piètre gestion des finances publiques et une ingéniosité fiscale qui frise l’obsession.
Se féliciter de voir des investisseurs français aller chasser sur le territoire européen. Une étude de Savills révélait que 80 % des investissements des SCPI au 1er trimestre 2025 étaient à l’international.
Parmi les arguments avancés, on trouve une volonté de diversification géographique, un accès à des marchés et des économies plus dynamiques, un couple risque/rendement plus attractif, mais aussi une fiscalité moins punitive.
On peut même parler de distorsion fiscale, car les loyers des immeubles étant imposés dans le pays de situation, ils ne subissent pas les 17,2 % de prélèvements sociaux. « Ce seul écart suffit à orienter les flux, sans même avoir besoin d’un différentiel de performance » (…) et « pousse mécaniquement les gestionnaires à investir hors de France et les épargnants à favoriser les SCPI dites ‘‘européennes’’ », s’émeut à juste titre Faïz Hebbadj, président de Norma Capital. Sur dix ans, il chiffre le manque à gagner fiscal pour la France à 1,6 Md€.
Mais pendant ce temps, on s’écharpe autour de la taxe Zucman et sur l’opportunité de taxer les riches, parfois même avant qu’ils ne le deviennent. Pauvre France.