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Point de vue de Gabrielle Millan, Allianz Real Estate France

Du BIM au CIM : quels enjeux ?

© Francesco Scatena / Adobe Stock

Ces dernières années, le BIM (Building Information Modeling) a pris une place conséquente comme action d’innovation dans l’immobilier pour tous les acteurs de l’écosystème. Tout d’abord en tant que méthode de travail disruptive sur les projets immobiliers, puis progressivement comme un moyen d’initier une data room virtuelle d’un actif et le suivre sur toute sa durée de vie en fonction des interventions sur l’immeuble. Ce formidable outil de data visualisation apparaît alors comme un véritable modèle agglomérant de l’information liée à la maquette numérique sur chaque bâtiment. Cette information pouvant servir à offrir du service aux utilisateurs et à faciliter l’exploitation et la connaissance du bâtiment pour les propriétaires.

Mais au delà de l’échelle du BIM sur un bâtiment, il y a celle du quartier en BIM pour atteindre ensuite celle d’une ville en BIM. À présent, le BIM s’est effectivement étendu à la ville voire à un territoire : on parle de CIM (City Information Modeling). 

À l’instar de l’utilisation de la modélisation des données du bâtiment, on va ici modéliser les données de la ville sans se limiter aux informations utiles aux propriétaires et aux locataires d’immeubles mais à tout usager urbain. Les informations de la ville deviennent visualisables sur le modèle numérique BIM.

Il est ainsi possible de faire des scénarios et toutes les simulations voulues à travers des maquettes numériques BIM de villes ou de morceaux de ville. Cela permet notamment d’anticiper les risques, les événements naturels et climatiques, les sujets de mobilité urbaine, la gestion des ressources, la gestion de l’énergie, la logistique en ville ou encore l’impact carbone. À titre d’exemple, l'Institut d'aménagement et d'urbanisme d’Île-de-France (IAU IDF) a recours au CIM pour simuler les risques liés aux crues centenaires. Les résultats de ces simulations permettent entre autres de faire évoluer le plan local d'urbanisme (PLU) des communes concernées et d’identifier précisément les bâtiments risquant d’être les plus sinistrés. Les zones inondables peuvent ainsi être mieux repérées dans les PLU, immeuble par immeuble, et la vulnérabilité plus contrôlée.

Des croisements de données entre le Système d’informations géographiques (SIG) et les simulations faites sur les maquettes numériques des villes conduisent à anticiper l’ensemble des risques bien plus finement qu’auparavant. Nous passons d’une analyse à l’échelle de zones ou de quartiers à une analyse plus fine à l’échelle de bâtiments ou de terrains dans ces secteurs. Certains assureurs utilisent par exemple cette méthode pour mieux répartir les zones à risques sur le territoire et prévoir les indemnisations par immeubles des potentiels sinistrés.

Mais le CIM peut aussi être le support de données des nouveaux usages en ville. Par exemple, le CIM peut constituer une aide dans la course à l’agriculture urbaine afin d’identifier les zones les plus favorables à la plantation en croisant les données climatiques précises et les orientations des immeubles. Il est aussi possible de repérer en temps réel sur le modèle numérique les pousses à terme pour solliciter leur récolte.

Le CIM est aussi un moyen de réaliser des simulations sur les smart grids afin d’anticiper les consommations énergétiques et mieux les repartir et les contrôler.

C’est ainsi que les plates-formes urbaines de gestion de la ville peuvent être liées et connectées aux avatars numériques BIM afin de faire de la data visualisation sur le modèle BIM. Les API permettent aussi d’en développer des applications toutes implémentées sur la même base de données pour en augmenter la fiabilité.

Ces nouvelles méthodes permettent de faire évoluer la gouvernance de nos villes : on parle ainsi de BIM urbain. Par le biais du CIM, une véritable stratégie territoriale de gestion des données numériques d’une ville peut être déployée.

Certains detracteurs diront néanmoins à raison que le CIM est un moyen supplémentaire de tracer toute information sur un territoire d’action sans que les initiateurs de ces informations puissent en être informés.

Il est certain que tout en garantissant une augmentation de la sécurité urbaine, le CIM doit être encadré en termes de cybersécurité plus que tout autre outil numérique.

Vous l’aurez compris, l’objectif du CIM est bien d’aider à tendre vers une ville resiliente capable d’offrir un cadre de vie meilleur, plus confortable, plus sécurisé pour regagner en qualité de vie.

Les plus réticents au BIM peuvent trouver ici une nouvelle motivation à s’y intéresser face aux opportunités offertes par ce changement d’échelle. Changement possible uniquement si le public et le privé croisent leurs données et les géolocalisent sur les modèles BIM des villes afin de créer des applicatifs d’aide à la décision plus poussés et des services pour un CIM efficace. Les foncières et l’ensemble des propriétaires seront des moteurs obligatoires à ces nouvelles stratégies urbaines grace aux données BIM de bâtiments qu’ils peuvent partager. 


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