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Point de vue de Tristan Ruiz, Adéquation

Foncier abordable : les réserves inexploitées des bailleurs sociaux

L’une des conséquences de la réforme du logement social est que les bailleurs s’activent désormais à développer des produits immobiliers, en particulier dans le domaine de l’accession abordable. Les services “développement” qu’ils ont récemment créés ou étoffés se mettent en ordre de marche pour lancer des opérations sur ce segment de marché, d’où une nécessaire recherche de foncier.

© Gilles Paire / Adobe Stock

Faut-il le souligner ? La prospection foncière n’est pas le cœur de métier des bailleurs sociaux. 

C’est d’autant moins le cas que l’effervescence actuelle fait suite à une longue période de déclin du développement en maîtrise d’ouvrage directe au profit de l’acquisition de programmes en VEFA auprès des promoteurs. Favorisé par la loi SRU puis par le plan de relance de 2009, ce mode de production de logements sociaux s’est installé durablement dans le paysage et concerne aujourd’hui plus de la moitié des logements sociaux produits chaque année.

Dans le même temps, les bailleurs sociaux ont été fermement invités à consacrer toujours plus d’efforts à la qualité de leur patrimoine et à la restructuration de quartiers prioritaires de la politique de la ville. 

Une culture de plus en plus “patrimoniale” s’est ainsi imposée au sein des organismes, en particulier dans les équipes chargées de travailler avec l’ANRU et les collectivités sur les projets du NPNRU. 

Or le NPNRU est une véritable “machine à créer du foncier”, y compris pour les programmes en accession des bailleurs.

Les projets NPNRU visent largement à libérer des fonciers occupés par des logements sociaux au profit de programmes libres ou d’accession sociale, ou encore d’espaces publics. 

En toute logique, les chefs de projet NPNRU des bailleurs n’avaient jusqu’à aujourd’hui aucune raison de conserver des fonciers sur lesquels la reconstruction de logements sociaux était proscrite. Il était plutôt plutôt normal qu’ils s’en défassent, soit en les valorisant auprès de promoteurs mais le cas est rarissime, soit en les cédant pour l’euro symbolique à la collectivité ou à Action Logement au titre des compensations foncières, laissant ces acteurs les transformer dans le sens d’une amélioration générale des quartiers.

Or dès lors que ces fonciers deviennent “éligibles” à la construction de programmes en accession sociale, qui mieux que les bailleurs sociaux présents dans ces quartiers peuvent les développer ? 

Non seulement le foncier leur appartient, mais ils ont en outre un accès privilégié à leurs locataires, qui connaissent le quartier et y ont des attaches, et constituent à l’évidence le meilleur réservoir de clientèle pour des programmes en accession sociale. La précommercialisation n’en sera que plus rapide.

Pourquoi ne le font-ils pas ? Peut-être tout simplement parce que les équipes impliquées dans les opérations du NPNRU et les équipes chargées du développement ne se parlent pas assez. 

Une meilleure communication interne permettrait sans doute d’identifier des opportunités de projets, à charge pour les équipes du développement d’en valider le potentiel. 

Convaincre une clientèle (en partie) extérieure au quartier d’y investir supposera d’accorder une attention particulière au confort des appartements et à la qualité de leur environnement immédiat, mais aussi de caler les prix au plus juste pour correspondre au budget des ménages cibles.

Autant d’études qu’il faudra de toute façon mener dans n’importe quel projet d’acquisition foncière. La seule différence est que l’on parle ici de fonciers déjà possédés, qui ne coûtent rien (et ne valent quasiment rien non plus dans le cas d’une cession) sur des sites où la précommercialisation devrait être facilitée.

Cela vaut peut-être la peine d’en parler ?

  • Tristan Ruiz

    Directeur commercial délégué - Directeur de marché bailleurs sociaux, OFS - Adequation - Agence de Montpellier

    Auteur(e) de 3 articles

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