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Investissement immobilier : les enseignements à tirer d’une crise sanitaire inédite

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L’épidémie de Covid-19 est une crise sans réel précédent dans nos économies modernes. Les mesures sanitaires de confinement frappent de plein fouet des segments entiers de l’économie, pour une durée qui reste impossible à évaluer précisément. Il n’est donc pas surprenant de voir les marchés financiers, qui ont horreur du doute, plonger violemment. Et la question se pose d’une éventuelle contagion à l’immobilier.

L’inertie inhérente à l’immobilier est un facteur protecteur

Rappelons d’abord que l’immobilier se subdivise en deux mondes aux ressorts très différents : l’immobilier résidentiel, surtout lié à la capacité d’emprunt des ménages et l’immobilier d’entreprise, plutôt corrélé au PIB. Et l’immobilier d’entreprise, essentiellement des bureaux, que les Français plébiscitent à travers les SCPI. Par construction, l’immobilier d’entreprise s’ancre dans le temps long avec une visibilité sur les flux liés à des baux à 3, 6, 9, 12 ans plus ou moins fermes. Quant aux délais de transactions, ils sont aussi assez longs : une inertie qui sera naturellement protectrice dès lors que la crise est suffisamment courte.

Mais si la crise s’avérait plus longue, le risque potentiel auquel seraient exposés les investisseurs en SCPI est essentiellement un risque de crédit, lié à l’impossibilité des locataires de payer. En ce sens, il est intéressant de voir comment les choses se sont déroulées au moment de la violente crise financière de 2008. Or, il n’y a alors pas eu de véritable chute de la distribution de revenus par les SCPI post-Lehman. Et les défaillances parmi les locataires sont restées très stables. Ainsi, en 2010, la collecte était déjà supérieure de 75 % au pic de l’année 2007. Certes, les annonces gouvernementales sur la suspension des loyers pour les entreprises en difficulté sont une nouveauté cette fois, mais on parle ici d’un risque affectant ponctuellement certaines SCPI thématiques, plus que de la valeur de l’ensemble des biens immobiliers.

Le marché immobilier ne présente pas de fort risque endogène

La raison de la résistance de l’immobilier d’entreprise observée après 2008 réside aussi dans un autre facteur : la crise des subprimes a trouvé sa source dans l’immobilier certes, mais il s’agissait de l’immobilier résidentiel américain. À ce moment, il n’y avait absolument pas d’excès d’offre sur le marché de l’immobilier d’entreprise européen. Et ce, contrairement à ce qui avait été observé durant la crise immobilière des années 1990, où ce problème, combiné à une politique de franc fort et de taux longs très élevés, avait été un déclencheur.

Même si nul ne peut prédire avec précision les conséquences économiques de la crise sanitaire, nous pouvons considérer que nous sommes plutôt dans le premier cas que dans le second. Avec un taux de vacance particulièrement bas de 5 % sur le marché du bureau francilien et des actifs en construction qui représentent de l’ordre de 4 % du parc installé, on ne peut pas parler d’un marché déséquilibré. Cette crise n’est donc pas endogène à l’immobilier, et ça c’est une bonne nouvelle. Ce paramètre, couplé aux nombreuses liquidités présentes dans le marché (que les banques centrales ne manqueront pas d’abonder), l’actif immobilier ne devrait pas être boudé, bien au contraire selon nous. Alors certes, l’immobilier apparaît cher aujourd’hui en données absolues, mais sa rémunération relative par rapport aux taux sans risque est en réalité au plus haut depuis 10 ans. Cela laisse de la place pour une éventuelle baisse des prix de l’immobilier que nous promettent les Cassandre depuis plusieurs années.

La crise actuelle : un révélateur d’évolutions structurelles de l’immobilier tertiaire

Les investisseurs immobiliers n’ont-ils donc pas à se soucier le moins du monde du coronavirus ? Pas si vite. Il reste deux sujets de risque : d’abord, si le système bancaire venait à être fragilisé par la crise, la réduction du marché du crédit obligerait les investisseurs immobiliers à diminuer l’effet de levier, ce qui diminuerait les liquidités disponibles, et impacterait évidemment les retours sur investissement. Ensuite, si les défaillances d’entreprises se multipliaient, l’impact sur l’équilibre entre offre et demande d’immobilier serait direct. C’est cette réalité qui nous incite à ne pas avoir de position tranchée sur le commerce, en première ligne dans cette crise et qui, par ailleurs, connaît des mutations structurelles importantes et encore inachevées. Le marché du bureau devrait afficher une plus grande inertie. C’est la raison pour laquelle, chez Novaxia Investissement, nous préférons promouvoir des fonds diversifiés géographiquement et/ou sectoriellement, plutôt que monothématiques. S’ils sont séduisants car lisibles, ils risquent aussi de se refermer sur leurs investisseurs en cas de mauvais choix. Or, qui aurait pu faire un tel pari sur le commerce il y a six mois ?

Mais surtout, venant après la longue grève des transports qui a notamment affecté les Franciliens, les mesures de confinement consécutives au coronavirus viennent démontrer que le sujet du télétravail devient incontournable. S’il l’est pour les entreprises, qui auront demain besoin de moins de surface, mais plus de flexibilité dans son exploitation, il le devient aussi pour les investisseurs en immobilier. Nous devons aujourd’hui regarder les actifs immobiliers différemment, plus seulement du point de vue de la valeur d’usage ou de la destination du bien, mais aussi du point de vue de l’usager. La valeur d’un bien n’est plus seulement liée à son emplacement, mais à la capacité du gérant à comprendre les besoins de ses locataires afin d’adapter son actif et le valoriser.

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