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Point de vue de Thibault Jézéquel, Racine

Quelques enseignements tirés des contrôles de l’AMF sur les prestations immobilières des sociétés de gestion

AMF © Business Immo

Le 27 mars dernier, l’Autorité des marchés financiers (AMF) a publié la synthèse de ses contrôles SPOT portant sur les modalités de réalisation des prestations immobilières par les sociétés de gestion de portefeuille (SGP).

Pour rappel, cette campagne thématique a été lancée simultanément en juin 2019 chez six gestionnaires d’actifs immobiliers. Il s’agit de la première campagne visant spécifiquement les SGP immobilières, depuis le lancement de ces nouvelles modalités de contrôle en 2018. Les investigations menées par l’AMF ont porté sur une période s’étalant sur environ quatre ans, soit du 1er janvier 2016 au 20 octobre 2019.

Elles visaient en particulier à examiner les activités d’asset et de property management (« Activités ») des SGP, au travers de sept éléments : les modalités d’organisation des gestionnaires, le corpus procédural associé, les modalités de sélection et de suivi des prestataires, les modalités de tarification des prestations, l’information des investisseurs, la gestion des conflits d’intérêts et le dispositif de contrôle lié. On notera, à ce titre, que les Activités ne sont pas définies par la réglementation et peuvent recouvrir des périmètres différents selon les acteurs.

Ce document de synthèse, s’il ne peut être assimilé à une doctrine de l’AMF, présente toutefois un éclairage instructif sur l’interprétation de certaines règles par le régulateur. Tout en dressant des constats, l’AMF détaille quelques bonnes pratiques observées mais déplore également plusieurs mauvaises pratiques susceptibles de faire obstacle à une gestion efficace et pérenne des risques en matière de prestations immobilières. À ce titre, il est notamment souligné que ces mauvaises pratiques caractérisent un non-respect de la réglementation applicable mais sont également susceptibles de se traduire par des impacts opérationnels négatifs chez les acteurs concernés.

Plus précisément, lorsque des défaillances ont été constatées par l’AMF, celles-ci ont notamment porté sur les éléments suivants :

  • la formalisation des procédures couvrant les Activités (précision et caractère opérationnel insuffisant, périmètre de couverture incomplet) ;
  • la traçabilité des processus de sélection et de suivi des prestataires (documentation incomplète des appels d’offres passés, absence de formalisation du choix du prestataire sélectionné, absence de documentation des critères de sélection utilisés) ;
  • la formalisation et la traçabilité des contrôles permanents et périodiques (fiches de contrôle imprécises, absence de piste d’audit et de documents de travail du contrôleur, périmètre de couverture incomplet) ;
  • la prévention et la gestion des conflits d’intérêts (caractère non-opérationnel du dispositif, absence de gestion des situations de conflits d’intérêts avérés, en particulier en cas de sélection de prestataires issus du même groupe que la SGP) ; 
  • l’information des investisseurs (absence d’information des porteurs concernant l’identité d’un prestataire unique exerçant les deux Activités pour un même fonds).

Dans ce contexte, si les constatations de l’AMF pourraient apparaître comme relativement sévères, il convient également d’être souligné que le régulateur invite l’ensemble des SGP immobilières à s’inspirer des bonnes pratiques relevées à l’occasion de cette campagne de contrôle. Celles-ci sont d’autant plus intéressantes qu’elles constituent, pour la plupart, le pendant des mauvaises pratiques constatées et sont détaillées par l’AMF afin de promouvoir un nivellement par le haut des pratiques des gestionnaires d’actifs immobiliers. Par ailleurs, leur traduction opérationnelle devra tenir compte de la diversité des SGP immobilières (tant en matière de typologies de fonds gérés, d’investisseurs ciblés, de niveaux d’encours, etc.), tout en considérant le degré d’exigence requis par la réglementation. Sur ce dernier point, en particulier, l’AMF ne peut que constater l’absence de précision de certains modèles types actuels de documents réglementaires en matière de niveau de détail du coût des prestations et des modalités d’organisation des Activités au sein des gestionnaires.

Toutefois, compte tenu des conséquences opérationnelles négatives susceptibles d’être engendrées par les mauvaises pratiques précitées et du risque de sanctions disciplinaires encouru (la prévention des conflits d’intérêts étant, par exemple, l’un des thèmes de sanction récurrents de l’AMF), nous ne saurions que trop recommander aux SGP immobilières de prendre attentivement connaissance du contenu de cette synthèse en vue d’ajuster leurs dispositifs et de renforcer leur formalisation, le cas échéant.

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