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François Le Levier, CBRE

Le sale & leaseback, un levier de financement en plein boom pour les acteurs logistiques

François Le Levier © CBRE

Les actifs logistiques ont le vent en poupe, comme en atteste l’engouement de plus en plus marqué des marchés de capitaux pour cette classe d’actifs, avec un véritable effet d’accélérateur donné par le Covid et le confinement à cette tendance.

Les raisons de cet engouement tiennent à l’évolution des marchés :

- Financiers, qui sont dans un haut de cycle historique, les taux d’emprunt n’ayant jamais été aussi bas et les capitaux aussi importants à vouloir investir en immobilier logistique ;

- Économiques, qui voient une progression exponentielle du e-commerce, ce qui impacte directement la supply chain et les besoins en logistique urbaine ;

- Immobiliers de l’investissement en logistique, qui sont exsangues d’opportunités de qualité et souffrent d’un déséquilibre important entre l’offre et la demande.

Le moment est donc particulièrement propice pour réaliser la valeur des actifs sur ce segment.

La crise sanitaire a amplifié le refuge dans la pierre et l’attrait pour l’actif de la logistique considéré comme plus résilient, plus résistant. Conséquence : un déséquilibre entre cet afflux de capitaux et les biens disponibles et une envolée des prix de vente. Comme en témoigne le sale & leaseback du transporteur Jacky Perrenot avec Tristan Capital Partners, qui est avec 180 M€ et plus de 50 sites concernés la plus grosse transaction de sale & leaseback réalisée à date sur le marché logistique en France.

Les sale & leaseback d’entreprises représentent un tiers du marché en France

Mais le plus marquant, c’est surtout la place prise par les entreprises/utilisateurs dans ce contexte de pénurie d’actifs à vendre sur le marché. Dans un marché de l’investissement logistique et industriel estimé à plus de 4 Mds€ pour 2020, les ventes d’utilisateurs devraient représenter plus d’un tiers en volume, avec 26 transactions référencées, soit trois fois plus que l’an dernier.

Si cette proportion des entreprises dans les ventes cette année est nouvelle, c’est surtout une véritable aubaine. Car il y a actuellement vingt fois plus de capitaux sur le marché que de biens disponibles. À l’issue du confinement, l’émission de la dette franco-allemande et les facilités financières ont notamment amené des dizaines de nouveaux entrants. Des Anglo-Saxons, qui ont une expérience historiquement plus ancienne dans les opérations de sale & leaseback, mais aussi des Allemands particulièrement actifs en ce moment sur le marché. Certains investisseurs se sont même spécialisés dans les opérations de sale & leaseback, avec des stratégies diverses, pour le développement de friches industrielles ou pour accompagner les utilisateurs à long terme.

Halte aux idées reçues. Ce n’est pas parce qu’on vend qu’on va mal

Signe d’une période de précrise économique, les entreprises cherchent à générer du cash afin de renforcer leur bilan, et de rétablir l’Ebitda de cette année. Historiquement, les ventes d’utilisateurs ne représentent que 10 % du marché de l’investissement logistique en France. Faut-il voir dans le triplement de cette proportion le signe que les entreprises du secteur vont mal ?

Pas forcément ! Diverses motivations poussent les entreprises à vendre. La plupart des utilisateurs vendent pour alléger leur bilan malgré l’impact IFRS 16 de réintégration des loyers, rembourser une partie de leur dette ou le prêt garanti par l’État (PGE) ; bref, anticipent au contraire pour parer aux difficultés attendues pour l’année prochaine. Si les sale & leaseback peuvent concerner la vente de bâtiments vides ou que les utilisateurs cherchent à libérer à court terme, certaines entreprises n’hésitent pas à l’utiliser pour la cession d’actifs stratégiques dans une logique de partenariats de long terme avec une visibilité sur la pérennité et la sécurité de leur site.

Acte de bonne gestion, ce choix de refinancement émane par ailleurs d’entreprises dont le bilan est sain et en bonne santé financière, mais qui choisissent ainsi de se concentrer sur leur core business qui n’est pas l’immobilier. S’ils restent attentifs à la localisation, les investisseurs, eux, regardent la qualité du locataire et sa durée d’engagement.

Un bouleversement culturel, amené à durer ?

On l’a vu, la crise est un accélérateur pour ces opérations d’externalisation. C’est aussi l’occasion – malgré un frein culturel fort (« En France, on doit rester propriétaire de son usine ») – de nettoyer des patrimoines dormants.

De plus en plus de bâtiments réputés non vendables, parce que trop spécifiques, retiennent aujourd’hui l’attention et prennent de la valeur compte tenu de la rareté du foncier, de la difficulté à obtenir des autorisations ICPE et de l’augmentation des charges foncières dans les grandes villes.

Dans un contexte de réflexion collective sur la ville de demain, ces sites industriels – s’ils sont libérés à court ou moyen terme – sont aussi des occasions pour les opérateurs de réaliser cette nécessaire transformation urbaine.

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