Business Immo, le site de l'industrie immobilière

Repli de la RICS : la Charte de l’expertise et TEGoVA se renforcent

© greenbutterfly / Adobe Stock

Le Covid-19 n’en finit pas de plonger le monde dans la crise et de déstabiliser toutes les organisations, même les plus ancestrales comme la RICS. Cette dernière envisage de réduire ses effectifs et ses implantations locales en Europe sous l’effet d’une crise encore plus profonde en 2021 et épouser également la disruption numérique.

Sans évoquer le Brexit, qui va marquer mécaniquement une diminution de l’influence de la RICS en Europe continentale, l’organisation britannique anticipe en toile de fond une redistribution des cartes inéluctable.

La RICS propose une approche globale en direction des métiers principaux de l’immobilier qui s’est mise en œuvre en fonction de la motivation et de l’investissement de ses représentants régionaux salariés et bénévoles. L’adaptation locale en raison de l’unicité de l’immobilier va diminuer mécaniquement l’influence de la vieille dame anglaise de l’immobilier.

L’évaluation immobilière pourrait aussi être impactée par cette nouvelle organisation.

L’Afrexim, soucieuse d’un haut niveau de qualité dans la mise en œuvre des missions d’expertise, s’interroge naturellement sur les conséquences d’une évolution si importante et si drastique de la RICS. D’autant que le contexte de crise sanitaire, comme dans tout contexte de crise touchant l’immobilier, conduit tous les regards à se tourner aujourd’hui vers les experts en évaluation immobilière. La valeur vénale des actifs repose sur nos appréciations régulières.

Si la mise en œuvre de mission d’expertise en évaluation immobilière en France conforme aux recommandations du Red book sera toujours possible pour les clients qui le souhaitent, on peut s’interroger pour le futur sur la transposition dans la Charte de l’expertise en évaluation immobilière des concepts spécifiques de la RICS.

Or, à la différence de la plupart des pays d’Europe continentale, la France dispose avec cette Charte d’un référentiel d’expertise en évaluation immobilière local et propre dans lequel sont transposés les concepts et recommandations des créateurs de normes d’estimation que sont l’International Valuation Standards Council (IVSC), la RICS et The European Group of Valuers Association (TEGoVA) avec son Blue book. La RICS est d’ailleurs signataire des 4e et 5e édition de la Charte.

Il est probable que l’Union européenne soit de son côté conduite à s’appuyer uniquement sur les European Valuation Standards (EVS) ou Blue book de TEGoVA puisque ses membres interviennent pour une grande majorité dans des pays de l’Union. TEGoVA regroupe en son sein 38 pays, dont tous les pays européens et 72 associations d’experts en évaluation immobilière européennes. Cela avait déjà été le cas lors de la mise en place de la directive AIFM.

La Charte est un référentiel signé par la quasi-totalité des associations et ordres regroupant en leur sein, à titre principal ou accessoires, des experts en évaluation immobilière. Il est reconnu par les pouvoirs publics, par les magistrats et par les organisations professionnelles. Ce référentiel, comme celui de TEGoVA à la différence du Red book, est parfaitement adapté aux estimations des sociétés de gestion d’actifs immobiliers pour leurs SCPI, OPCI, et FIA.

Cette reconnaissance a conduit aussi à ce qu’un manquement susceptible de mettre en cause la responsabilité civile professionnelle de l’évaluateur soit apprécié sur le fondement des recommandations de la Charte de l’expertise en évaluation immobilière. L’obligation de moyens à laquelle est assujetti l’expert en évaluation immobilière s’analyse donc par rapport à la Charte de l’expertise en évaluation immobilière en droit civil français.

C’est pour cette raison que le contrôle de qualité réalisé par l’Afrexim, unique en son genre, s’attache à vérifier la conformité non seulement des rapports d’expertise, mais aussi du contrat d’expertise avec les standards de la Charte uniquement, et ce depuis plus de 20 ans.

L’autre risque engendré par la disparition d’une présence physique de la RICS pour les clients des experts en évaluation immobilière aura trait à l’obligation de formation annuelle à laquelle ils sont astreints et que la RICS pouvait organiser. La reconnaissance des qualifications professionnelles est le second pilier garantissant aux clients des évaluateurs un haut niveau de qualité.

Le dispositif « valuer registration » risque de perdre encore en influence face à son grand concurrent Recognised European Valuer (REV) de TEGoVA qui s’impose depuis 2008 en Europe. C’est d’ailleurs plus la spécialisation de l’objet associatif de TEGoVA en direction de l’évaluation immobilière qui a permis à cette association d’apporter une réponse spécifique aux besoins des experts et de leurs clients.

La formation, les échanges, la création et l’adaptation de nouvelles normes dans un secteur aussi changeant que l’immobilier ne se fera plus aussi facilement qu’avec une présence physique parfois dans le même immeuble pour certaines associations. Les synergies risquent d’être considérablement diminuées.

Enfin, la refonte, qui semble être en cours d’étude, des valeurs qui régissent les membres de la RICS en vue d’une simplification, notamment en matière de déontologie, semble peu opportune. Les valeurs de la RICS avaient fait en grande partie son succès à la fin des années 1980.

Il est cependant heureux que ces valeurs de la RICS soient communes à celles qui figurent dans la Charte de l’expertise en évaluation immobilière, mais aussi dans les référentiels mondiaux (IVSC) et européens (TEGoVA).

En définitive, les efforts des organisations d’experts en évaluation immobilière au premier rang desquelles figure l’Afrexim depuis 20 ans continueront à porter leurs fruits, y compris avec un repli si important de la RICS.