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Anne Epinat et Christopher Boinet, In Extenso Avocats, Julien Guittet, In Extenso TCH

Le retour en grâce de la location-gérance hôtelière

© Photobank / Adobe Stock

Porté par un assouplissement législatif, le dispositif de location-gérance hôtelière séduit de plus en plus d’investisseurs à la faveur d’un excellent rapport bénéfice/risque.

Quel est le point commun entre la Société des membres de la Légion d’honneur, l’hôtel Golf Château de Chailly, en Côte-d’Or, et le fonds américain Sonder, concurrent direct d’Airbnb ? Ils ont tous les trois choisi la location-gérance pour développer leurs activités hôtelières. Cela ne doit rien au hasard. Si la location-gérance s’attire les faveurs des investisseurs du secteur, c’est grâce à son régime juridique flexible, taillé pour l’investissement.

La flexibilité comme maître mot

S’il est bien un atout que peut revendiquer la location-gérance, c’est celui-ci. Il faut dire que le carcan légal qui a longtemps contraint le loueur du fonds lors de la mise en location-gérance a progressivement disparu. S’il reste soumis à la publication légale, le dispositif ne s’encombre plus de formalisme et peut n’être que verbal, bien que l’écrit soit fortement conseillé.

Sous réserve de respecter les quelques règles de base encadrant la location-gérance, les parties ont toute latitude pour aménager leurs rapports contractuels. Sur le plan opérationnel, loueur et locataire-gérant ont ainsi le loisir de définir la durée du contrat, répartir la charge des investissements et décider du sort des aménagements réalisés dans le bâtiment d’exploitation.

On retrouve cette flexibilité dans les modalités de paiement de la redevance, enjeu central de la location-gérance. Habituellement, celle-ci est basée sur un minimum garanti et complétée par une redevance variable indexée sur le CA et/ou le RBE. Le propriétaire du fonds peut également imposer au locataire-gérant des objectifs de performance. Dans les faits, la distinction avec le contrat de management hôtelier est ainsi parfois ténue1. Si le loueur est preneur à bail, on pourra compter un taux de redevance de l’ordre de 20 % du chiffre d’affaires afin de rémunérer la location du fonds et des murs pour les hôtels traditionnels de 3-4 étoiles. Le taux de redevance peut être plus élevé selon le modèle économique du locataire gérant. Enfin, si le loueur est propriétaire des murs et du fonds et si le locataire-gérant supporte contractuellement des travaux de rénovation et des charges significatives, la redevance sera d’autant moins élevée. Précision utile : dans tous les cas, la redevance est déductible fiscalement, sous réserve de ne pas être excessive et de ne pas dissimuler une cession de fonds de commerce.

Le risque maîtrisé

L’atout charme de la location-gérance hôtelière ? Un excellent rapport bénéfice/risque. Le loueur conserve en effet la propriété du fonds de commerce hôtelier sans en assumer pour autant le risque d’exploitation. Et entre la perception des redevances versées par le locataire-gérant et l’augmentation de la valeur du fonds de commerce régulièrement exploité, le retour sur investissement peut être aussi attractif que rapide. Cette formule permet en outre au propriétaire d’un fonds hôtelier de se choisir un éventuel successeur dans son fonds en l’associant à la marche de l’hôtel. Du côté du locataire-gérant, c’est l’occasion de se roder à l’exploitation hôtelière pour une durée plus limitée que dans le cadre d’un bail commercial hôtelier, plus contraignant depuis la loi Pinel de 20142. Enfin, le dispositif lui permet de gérer à ses risques et périls un établissement sans avoir à assumer les investissements nécessaires au lancement d’une activité hôtelière.

Pour optimiser son investissement, le loueur a tout intérêt à maîtriser les risques liés à la location-gérance de son fonds hôtelier. Car une mauvaise exploitation est synonyme de dépréciation de son investissement. Plusieurs clauses lui permettront de se ménager une porte de sortie. Le loueur pourra par exemple résilier le contrat de location-gérance et faire jouer les garanties si son cocontractant peine à lui régler ses redevances. Autre possibilité : imposer une durée de location-gérance courte, mais reconduite, offrant l’opportunité d’une sortie rapide. Pour couvrir son risque, le loueur peut également négocier diverses garanties financières sous forme bancaire et/ou consenties par la société mère du locataire-gérant. Ces points durs font souvent l’objet d’âpres négociations entre les parties et justifient le recours à un spécialiste de la location-gérance.

Toutes les bonnes choses ont une fin et la location-gérance n’y fait pas exception ! Il arrive que le contrat prévoie à terme la cession au profit du locataire-gérant, mais le loueur peut tout aussi bien reprendre le fonds. Pour éviter les mauvaises surprises, des précautions s’imposent. Outre l’aménagement d’un état des lieux d’entrée et de sortie, le loueur pourra se ménager un droit de consultation en cas d’embauche, de modification des conditions de travail ou de rémunération du personnel. Enfin, il a tout intérêt à négocier une clause de non-concurrence et de non-débauchage, indispensable vis-à-vis de son locataire-gérant.

Bien accompagnée et bien préparée, la location-gérance pourrait bien devenir un produit d’investissement incontournable du secteur hôtelier.


Cf. notre article sur LinkedIn sur le contrat de management hôtelier vs le contrat de location-gérance hôtelière - similitudes et différences : ici.

Cf. notre article sur LinkedIn sur le bail commercial v/s location gérance-hôtelière : ici.

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