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Nathanaël Trouiller, Haussmann Executive Search

L'immobilier n'échappe pas à l'ultracompétition sur le marché de l’emploi

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Notre marché immobilier va structurellement « consommer » plus de compétences et des compétences de plus en plus qualifiées pour des raisons bien connues :  

- toujours plus d’épargne désireuse de s’investir dans des produits sécurisés offrant du rendement ;

- une hybridation des produits et des usages qui augmente la complexité globale des projets immobiliers ;

- une valorisation des murs par les services aux occupants et peut-être à moyen terme par la création/gestion de communautés (exemple de La Casa ou d’espaces de coworking dédiés aux avocats) ;

- la polarisation du marché du bureau avec, d’un côté, des immeubles ultra primes à Paris au loyer toujours plus élevé, qu’il faudra rénover plus régulièrement, nécessitant des concepts de plus en plus sophistiqués ; d’un autre côté, des immeubles de périphérie avec une faible attractivité locative, qu’il faudra transformer ou raser.

- des actifs commerciaux avec une large diversité de situations qui nécessitent des expertises de plus en plus pointues en développement, acquisition ou asset management ;

- des classes d’actifs immobilières alternatives qui deviennent « main stream » (logistique et résidentiel) et de nouvelles classes d’actifs de niche qui contribuent à « assécher » le marché des compétences ;

- des évolutions réglementaires qui orientent l’immobilier vers la restructuration, complexe et consommatrice de ressources humaines ;

- l’accélération des acquisitions hors de France des investisseurs français pour déployer de plus en plus de fonds propres.

Globalement, l’industrie immobilière devra mettre plus d’intelligence et d’énergie pour maintenir des niveaux de profitabilité équivalents. Ce qui signifie plus de collaborateurs, mieux formés et provenant pour certains de secteurs d’activité connexes.  

Les tensions de marché sur les meilleures compétences, déjà extrêmement fortes, devraient encore s’accélérer.

Quelles stratégies de recrutement ?

Nos clients commencent à développer de nouvelles stratégies pour attirer des talents. Ces stratégies sont naturellement combinables :

- améliorer drastiquement la rapidité/l’efficacité du processus de recrutement : définition du projet de recrutement très détaillée et bien marketée ; pas plus de trois rendez-vous avec le candidat avec des interlocuteurs internes attractifs et bien préparés ; éventuellement une mise en situation qui permet au candidat de se projeter dans le poste ; capacité à donner une réponse ferme à un candidat en dix jours ; proposition contractuelle orale immédiatement offensive et non déceptive ; attention à la proposition écrite qui permet au candidat d’obtenir plus facilement une contre-offre de son employeur actuel ; délai de réflexion laissé au candidat le plus court possible (36 h suffisent)…

- proposer à des salariés talentueux une aventure entrepreneuriale, associée à de puissants outils d’alignement d’intérêt avec les actionnaires ; par exemple, développer une nouvelle filiale sur un nouveau métier ou un nouveau territoire en associant au capital de la filiale son patron et ses N-1 directs ; ce format est déjà « monnaie courante » chez les promoteurs résidentiels et il devrait se développer chez les investisseurs qui créeront des « operating partners » pour déployer du capital sur des stratégies/classes d’actifs/territoires spécifiques ; l’association du talent et du capital a de beaux jours devant elle ;

- recruter des talents en provenance d’une autre classe d’actif, en amont ou en aval de sa propre chaîne de valeur ou encore qui viennent d’univers connexes à l’immobilier ; et former un binôme/tandem avec un collaborateur interne expérimenté ;  

- attirer plus de profils seniors, moins sollicités par le marché, de nature à stabiliser l’organisation et à jouer un rôle clé de management/formation auprès des plus jeunes collaborateurs ;

- acheter une société avec des compétences clés, à partir de laquelle il sera possible d’attirer d’autres talents (le talent attire le talent) ; cette stratégie est largement utilisée par les sociétés d’AMO et les sociétés de conseil.

- anticiper une inéluctable hausse des rémunérations en ayant dès à présent des grilles de rémunération un peu supérieures aux moyennes de marché.

En conclusion, créer les conditions d’attraction des talents à même de répondre aux enjeux d’une industrie immobilière en complète mutation va nécessiter plus de rapidité, d’offensivité et de créativité. Cet enjeu stratégique devra être doublement porté les directions générales et les DRH.