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Le bureau entre Métamorphose ou Métamorphoses

En plein tumulte sur la question du taux d’usure, la Banque de France pond une note sur… la transformation de bureaux en logements. Quelle idée ! L’article est pourtant intéressant tant la question de la reconversion de bureaux est devenue une arlésienne dans l’industrie immobilière. Il permet de mettre en lumière que le premier frein n’est pas tant l’âpreté supposée des investisseurs qu’une certaine incurie administrative.

Que nous dit la Banque de France ? D’abord que la solution présentée comme miracle par certains pour résoudre une double crise, un trop plein de bureaux vides d’un côté, une pénurie d’offre de logement de l’autre, accouche d’une souris. Les statistiques sont cruelles : entre 2015 et 2019, un peu moins de 10 500 conversions ont été effectuées pour une surface totale de plus de 2,1 millions de m2. Cela représente moins de… 1 % de la surface totale des nouveaux logements. Autant dire qu’avec cette politique, plus proche de l’acuponcture ou de l’homéopathie que du traitement de cheval, aura peu de chance de guérir l’une des maladies de notre siècle : l’accès au logement.

Le plus agaçant dans cette note, c’est qu’on explique calmement que le premier frein à une politique massive de reconversion de bureaux en logements n’est pas financier. « Le prix relatif du logement par rapport au bureau n’a pas d’impact statistiquement significatif », écrit la Banque de France. Non, c’est plutôt le maquis réglementaire et administratif qui bloque un passage à l’échelle de la reconversion de bureaux en logements. Personne n’est surpris du constat, si ce n’est qu’il provient de l’administration elle-même.

Faut-il alors espérer un changement radical des usages pour espérer voir dans la transformation de bureaux de logements un premier élément participant au choc d’offre attendu et espéré par de nombreux ménages ? On pense bien évidemment au télétravail qui s’est installé durablement dans l’organisation des entreprises et des familles. D’après le modèle mathématique élaboré par les analystes de la Banque de France, l’un des éléments qui a le plus d’effet sur la transformation de bureaux en logements dans un bassin d’emplois donné est le nombre de mètres carrés par employé. Celui-ci sera structurellement en baisse à la faveur de la généralisation du télétravail.

Il est évident que le télétravail modifie aussi la cartographie de la demande de bureaux, comme de logements. Aux États-Unis, il a été théorisé par les professeurs Arjun Ramani et Nicholas Bloom sous le nom d’effet beignet (Donut Effect). Il se traduit par une diminution de l’attrait pour les centres-villes au profit des zones périphériques pour les particuliers. Par opposition, les entreprises se réintéressent à l’hypercentre, mieux connecté par un réseau de transport organisé de façon centripète. Pour autant, la Banque de France est lucide sur la question : « Sans changement de réglementation permettant d’encourager la reconversion de bureaux en logements, le télétravail ne devrait pas avoir d’effets massifs sur l’offre d’immobilier résidentiel à travers le canal de la reconversion. »

Tous les ingrédients sont réunis pour accélérer la métamorphose d’une partie du parc immobilier tertiaire. Y compris l’argument écologique. Tous, sauf la volonté politique. Aussi, ne soyons pas surpris si demain fleurissent les friches tertiaires.