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La tentation du rebond

© Timi Sace/CoStar

« Un pessimiste voit la difficulté dans chaque opportunité, un optimiste voit l’opportunité dans chaque difficulté. » Dixit Sir Winston Churchill. Les investisseurs immobiliers empruntent des accents churchilliens dans leurs analyses prospectives des marchés pour 2024, en particulier sur l’Europe.

Coup sur coup cette semaine, les grands gestionnaires d’actifs partagent leurs convictions pour l’année prochaine. Tous font le deuil d’une « annus horribilis » en 2023 pour le marché de l’investissement, marquée par un effondrement des volumes d’engagement en raison d’une trop grande divergence des attentes des acheteurs par rapport aux prétentions des vendeurs. Tous anticipent un rebond dès 2024. Avec quelques arguments audibles.

D’abord, un contexte économique et financier qui semble s’éclaircir. Le scénario central retenu par AEW projette une diminution de l’inflation et une récession économique évitée. Cela devrait se traduire par une détente des taux d’intérêt, dont beaucoup s’attendent à une stabilisation, voire à un reflux dans les prochains mois. Les investisseurs immobiliers pourraient ainsi voir leurs coûts de financement culminer au 1er trimestre 2024, et entrevoir ainsi la sortie du tunnel. De même, une croissance économique, si modérée soit-elle, reste un facteur de soutien pour l’emploi et la consommation des ménages, deux moteurs indispensables pour l’immobilier de bureau, de commerce et de logistique. Pour peu que l’offre soit contenue – et elle semble l’être dans les hypercentres des grandes métropoles européennes –, la bonne dynamique de la demande promet de soutenir les croissances des valeurs locatives. En tout cas pour le « prime », car il ne faut quand même pas oublier l’extrême polarisation des marchés et la disqualification certaine d’un nombre d’actifs ne correspondant plus à la demande en matière de produits comme de localisations.

Ensuite, le repricing des actifs permet de reconstituer les primes de risque. Les écarts d’attente en termes de prix ont paralysé le marché de l’investissement. Plus vite sera actée la baisse, plus vite sera enclenchée la reprise des volumes d’engagement. Et visiblement, les vendeurs craquent. Beaucoup, en « off » bien sûr, nous disent qu’il vaut mieux se couper un doigt aujourd’hui qu’un bras demain. Pour certains, on a déjà amputé un peu plus que le bras d’ailleurs. Cette vérité des prix, qui traîne encore un peu en France, va conditionner le rebond des marchés. Ce rebond des volumes s’accompagnera d’un rebond des valeurs. AEW le juge prématuré pour le 1er semestre 2024, mais l’envisage pour la seconde partie de l’année prochaine et pour 2025.

Enfin, l’inversion de l’effet dénominateur devrait débloquer de nouveaux capitaux pour l’investissement immobilier. La reprise de performance des actions et, dans une moindre mesure, du marché obligataire, allège le poids de l’immobilier dans les portefeuilles d’actifs des institutionnels et le fait repasser sous le seuil des 10 % d’allocation. Dès lors, s’ouvre la possibilité de revoir sur le marché des institutionnels qui, jusqu’alors, ont posé l’arme au pied.

La question maintenant est de savoir s’il s’agit de prophéties auto-réalisatrices. Le Simi qui s’ouvre dans une dizaine de jours sera un bon baromètre du sentiment des acteurs immobiliers. Tous ne seront pas sur la même échelle d’optimisme.

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