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Point de vue d'Aurore Vialatte, IEIF

[POINT DE VUE] Krach ou tourmente passagère ?

Ce début d'année est pour le moins chaotique sur les marchés financiers. Inquiétés par les tensions dues à un nouvel effondrement des prix du pétrole, une croissance mondiale dont les prévisions sont régulièrement abaissées par les organismes internationaux et le ralentissement de la 2e économie mondiale devenu palpable, les marchés boursiers ont connu un mois de janvier chahuté. En outre, l'annonce de potentielles faillites de sociétés pétrolifères ou gazières à horizon 2017, ainsi que les inquiétudes liées à la solidité du système bancaire italien n'ont fait que renforcer le marasme ambiant. La question de l'équilibre entre les deux premières économies mondiales à travers le rapport de leur monnaie respective paraît être au coeur des préoccupations des marchés financiers.

Outre-Atlantique, la Fed commence à émettre des réserves quant aux perspectives de l'économie américaine principalement en raison des possibles répercussions de chocs extérieurs. Ce faisant, l'institution américaine a maintenu ses taux inchangés en janvier arguant du ralentissement économique mondial et des turbulences ayant touchées les marchés financiers. Du côté du marché de l'emploi, les créations de postes publiées par l'enquête ADP sont moins bonnes que prévues avec 151 000 emplois créés (contre 185 000 attendus), loin des 262 000 postes créés en décembre. Toutefois, le taux de chômage a baissé pour s'établir à 4,9 % soit son plus bas niveau en 8 ans.

Pour autant, le recul de la production industrielle (-3,4 % en taux annualisé) associé à celui des prix à la production (-1% sur un an) et à l'aggravation du déficit commercial (-2,7 % en décembre) ne font que nourrir les interrogations des investisseurs. Du côté de l'activité industrielle et des services, l'évolution des indicateurs alimentent les doutes concernant la solidité de la croissance de l'économie américaine. On notera notamment un indice PMI manufacturier de 53,2 en janvier (54,3 en décembre), un indice PMI des services de 53,7 (contre 54,3 en décembre et 54 attendu), un indice ISM des services de 53,5 (55,3 en décembre et 55 anticipé), et surtout un indice ISM manufacturier de 48,2 (contre 48,2 en décembre). De plus, les acteurs économiques dévoilent leur perplexité à travers la stagnation des dépenses des ménages au mois de janvier et de l'indice de confiance de l'Université du Michigan à 92,6.

Sur le marché immobilier, l'évolution reste paradoxale. Tandis que les permis de construire reculent à 1,23 millions d'unités (contre 1,29 millions d'unités en décembre), que les mises en chantier perdent également du terrain à 1,15 millions d'unités (contre 1,18 millions en décembre) et que le moral des promoteurs continue de se voiler à travers l'indice NAHB qui atteint seulement 60 (après 61 en décembre et prévu) ; l'indice Case-Shiller atteint des sommets avec une hausse de 5,8% sur un an, son plus fort niveau depuis juillet 2014.

En Asie, les données publiées renforcent l'idée que le ralentissement chinois est certainement plus important qu'il n'y paraît. Au Japon, les exportations ont baissé de 8 % en décembre sur un an après -3,3 % en novembre, cependant la balance commerciale progresse à 36,6 MdsYens en janvier contre 22,4 en décembre. La confiance des acteurs reste relativement fébrile avec un repli de l'indicateur de confiance dans l'industrie à 12 au 4e trimestre (contre 15 au 3e) et surtout un recul de la consommation des ménages plus important que prévu à 0,8 % sur le 4e trimestre (0,6 % attendu). Au 4e trimestre, la contraction de la croissance japonaise de -1,4 % (en rythme annualisé) aura été plus importante que prévue. En 2015, l'économie nippone n'atteindra que 0,4% de croissance économique. Cela explique pourquoi, après avoir pris de larges mesures d'assouplissement quantitatif, et emboîtant le pas d'autres banques centrales, la Banque centrale du Japon a décidé de passer ses taux en territoire négatif (-0,1%). Du côté des statistiques chinoises, le ralentissement de l'Empire du Milieu a été confirmé par les chiffres publiés avec notamment une croissance au 4e trimestre 2015 de 6,8 % traduisant une croissance de 6,9 % pour l'année écoulée. Les exportations, moteur de la croissance chinoise, affichent leur 7e mois de recul avec -11,2 % en termes annualisés, la production industrielle s'est contractée de près de 6 % sur un an en décembre. Enfin, les IDE (Investissements directs étrangers) fondent, atteignant 12,23 Mds$ soit -5,8 % sur un an (+6,4 % en 2014). Néanmoins, certaine données laisseraient penser que les mesures prises par le Gouvernement soutiendraient la croissance dans certains pans de l'économie. On soulignera un indice PMI manufacturier à 48,4 (contre 48,2 en décembre), un indice PMI des services de 52,4 (contre 50,2 en décembre). Malgré cela, les investisseurs doutent toujours de l'efficacité des mesures prises par Pékin. Les sorties de capitaux deviennent assez massives entraînant la chute des cours, les réserves de change touchent leur plus bas en 3 ans à 3 230 Mds$ alors que la Banque populaire de Chine a injecté, au cours du mois de janvier, près de 1 915 milliards de Yuans (242 Mds$) dans le système financier afin de soutenir la nécessaire liquidité du marché.

En Europe, bien que l'accélération de la croissance paraisse acquise, des questions se posent sur la résistance de l'économie européenne face à de potentiels chocs extérieurs. L'indice PMI manufacturier de la zone Euro atteint seulement 52,3 en janvier (contre 53,2 en décembre), l'indice PMI du secteur des services se stabilise 53,6 en janvier (53,6 en décembre et prévu). En France, même si la croissance donne des signes de véritable progression, la baisse de l'indice PMI manufacturier à 50,2 (contre 50,5 en décembre et prévu), ainsi qu'un indice PMI des services en net recul à 56,3 (58,7 en décembre) obligent à rester prudent. L'Allemagne commence à inquiéter les investisseurs, l'indice de la production industrielle se tend à 108,1 (contre 108,3 en novembre) et la balance commerciale se détériore légèrement à 19,7 Mds€ (contre 20,5 Mds€ en novembre) révélant peut être les premiers signes de l'impact du ralentissement chinois sur la première économie européenne.

Du côté du moral des acteurs, la situation se révèle peu enthousiasmante avec un indice IFO du climat des affaires en janvier à 108,6 (108,7 en décembre) et un indice du sentiment économique ZEW des investisseurs pour la zone Euro qui plonge à 22,7 en janvier (après 33,9 en décembre).

A cela s'ajoute, un excédent d'épargne de 312 Mds€ sur un an en Zone Euro, qui témoigne de la présence de fortes liquidités qui ne pourront qu'influencer les marchés dans les mois à venir, et surtout le retour du spectre de la déflation.

Bien que les indices immobiliers européens aient suivi la chute généralisée des marchés financiers, ils affichent tout de même une certaine résistance à cette spirale baissière notamment en France. En effet, l'indice de performance globale Euronext IEIF REIT Europe a perdu 5,9 % sur le mois de janvier, tandis que l'indice Dow Jones Stoxx 50 a reculé de 6,3 %. L'indice Euronext IEIF SIIC France a une performance négative de 0,7 %, alors que l'indice CAC 40 a chuté de 4,7 % en janvier. Sur une période annualisée, les indices français, immobiliers et de référence, affichent de meilleures performances que celles des indices européen ou américain. Les indices Euronext IEIF REIT Europe et Dow Jones Stoxx 50 perdent respectivement 3,8 % et 6,3 %, tandis que l'indice Euronext IEIF SIIC France enregistre un recul de 3 % et que l'indice CAC 40 ne baisse que de 1 %.

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