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Point de vue de Robin Rivaton, Real Estech

Pas de ville intelligente sans mettre à niveau le parc de logements existants

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Alors que les investissements dans la Smart City se multiplient sur tout le territoire, peu de gens en mesurent l’impact concret sur le logement qu’ils occupent au quotidien. Et pour cause, l’immobilier résidentiel ne profite pas suffisamment des opportunités offertes par la ville intelligente. Il accuse même un retard technologique certain par rapport à l’immobilier commercial. La transformation de ce dernier a en effet été accélérée par l’arrivée de nouveaux concurrents qui ont obligé les acteurs traditionnels à se réinventer. Dans l’ordre chronologique, les e-commerçants, Amazon en tête, ont bouleversé la distribution physique avant de rebattre les cartes de la logistique, Airbnb a secoué les hôteliers et WeWork a commencé à s’infiltrer dans le bureau. Alors qu’il représente plus de 80 % de la valeur totale des actifs immobiliers dans le monde, l’immobilier résidentiel évolue plus lentement, notamment parce que les entreprises en place ne se sentent pas directement menacées.

Pour rendre les logements intelligents et ouverts sur la ville, il faut les équiper. D’abord de capteurs pour connaître les besoins des occupants et installer des outils de régulation, thermostats, valves, avec les réseaux de flux, eau, chaleur, électricité, données. La connexion avec le flux de personnes est l’autre grand défi à venir. Un appartement ne peut pas être connecté à la ville s’il n’est pas efficacement relié aux parties communes de l’immeuble dans lequel il est situé. Alors que nous continuons à nous débattre avec nos digicodes quand ce n’est pas des serrures métalliques, les taux de pénétration des serrures connectées en Corée du Sud et au Japon sont respectivement de 85 % et de 70 %. Cette connexion entre les différents espaces est d’autant plus importante que la part des immeubles mixtes ne cesse d’augmenter. Demain, l’acquisition ou la location de certains appartements donnera accès à un espace de coworking situé au dernier étage. Pour être sûr qu’il n’y ait pas de mauvaise direction du flux humain, la seule solution est la serrure connectée avec des droits d’accès variables selon la personne, les horaires, les jours…

Il s’agit ensuite de faire communiquer les différents appartements d’un même immeuble. Une communication efficace rendra possible la montée en puissance de services partagés tels que nous les voyons fleurir dans les bureaux modernes : restauration, garde d’enfants, chambre d’amis partagée. L’émergence d’une communauté de résidents, qu’ils soient propriétaires occupants ou locataires, est un prérequis à l’intégration de l’immeuble dans la ville intelligente.

C’est uniquement après avoir créé un sentiment de communauté et des outils de gestion partagés que nous pourrons connecter le logement à la ville en installant, par exemple, des voitures électriques à usage collectif au sein des immeubles ou en mettant en place les réseaux décentralisés de gestion de l’énergie (Smart Grids). Transformons nos bâtiments en véritables plates-formes et connectons-les judicieusement aux infrastructures de la Smart City. Ne le faisons pas à travers une initiative centralisée publique mais en permettant à de nouveaux acteurs privés d’émerger. L’américain Nextdoor a déjà levé plus de 200 M€ pour se positionner comme le réseau social privé de voisinage.

Quoi qu’il en soit, la tâche est immense. En raison de la démographie et de l’urbanisation, l’ONU estime qu’il va falloir loger près de 1,5 milliard d’humains supplémentaires dans les villes d’ici 2030. Pour le faire dans de bonnes conditions, il n’est pas possible de tout attendre de la production de logements neufs compatibles avec la Smart City. Dans une France où le parc de logements n’est renouvelé que de 1 à 2 % chaque année, il est plus qu’indispensable de mettre à niveau le stock existant.

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