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Externalisation intragroupe de prestations immobilières : une priorité de supervision et de contrôle de l’AMF en 2019

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Le 10 janvier dernier, l’Autorité des marchés financiers (AMF) a présenté ses nouvelles priorités de supervision et les thématiques qui feront l’objet de contrôles SPOT[1] en 2019.

L’une d’entre elles concerne spécifiquement les sociétés de gestion de portefeuille (SGP) françaises agréées pour mettre en œuvre une gestion immobilière : le régulateur souhaite examiner les modalités d’externalisation au sein d’un groupe de certaines prestations immobilières et les conséquences qui peuvent en découler.

Possibilité pour les SGP immobilières d’externaliser certaines prestations

À cette occasion, l’AMF a rappelé que les SGP immobilières peuvent faire appel aux expertises d’entités liées pour mener à bien leurs activités. Le régulateur cite plus particulièrement trois activités généralement externalisées : (i) les activités de sourcing, (ii) d’asset management et (iii) de property management.

Si l’on comprend aisément les raisons ayant amené certains groupes à mettre en œuvre de tels schémas organisationnels (recentrage sur le core business, mutualisation des moyens, accès à des compétences spécifiques, maîtrise des coûts, etc.), le régulateur demeure, quant à lui, particulièrement attentif à leurs modalités d’encadrement.

Ainsi, l’externalisation – y compris intragroupe – va devoir faire l’objet d’une documentation interne détaillée (comprenant, par exemple, des politiques et procédures de sélection et de suivi des prestataires externes). Cette documentation pour les personnes contrôlées sera attentivement examinée par l’AMF qui veillera, notamment, à ce que le principe de protection des investisseurs soit pleinement respecté.

Nécessite de prévenir et gérer les conflits d’intérêts pouvant en découler

Dans le cadre de ses contrôles SPOT, l’AMF va également prêter une attention particulière aux mécanismes de prévention et de gestion des conflits d’intérêts qui peuvent découler de cette externalisation. Cette problématique est d’ailleurs fréquemment rappelée par le régulateur et fait l’objet de développements au sein de plusieurs documents de doctrine et règles professionnelles approuvées par le régulateur [2].

Ainsi, si l’AMF considère que les conflits d’intérêts peuvent être inhérents aux activités de gestion immobilière, elle estime que certaines situations présentent particulièrement un risque et doivent faire l’objet d’un encadrement approprié par les acteurs concernés.

Concrètement, alors que l’AMF insistait dans sa position-recommandation sur les SGP d’OPCI en 2009[3] sur cinq grandes thématiques fréquemment rencontrées (i.e. positionnement du dirigeant partagé, sourcing des cibles d’investissement commune à plusieurs entités, modalités de répartition des cibles entre plusieurs sociétés ou véhicules d’investissement, sélection des intermédiaires susceptibles d’intervenir dans la gestion d’un fonds et modalités de prise de décision d’investissement), il semblerait que, près de dix ans plus tard, l’AMF souhaite désormais parfaire ses connaissances, comparer et tirer des enseignements de certaines pratiques spécifiques.

Pour rappel, les positions suivantes en matière de gestion des conflits d’intérêts sont toujours en vigueur :

  • concernant la problématique des dirigeants partagés entre une société ayant une activité de gestion pour compte propre et une autre société ayant une activité de gestion pour le compte de tiers, l’AMF requiert – sous réserve de l’examen de cas particuliers – la nomination de dirigeants distincts ;
  • concernant le sourcing de cibles d’investissement provenant de la vente par d’autres sociétés du groupe ayant d’autres activités (promotion ou marchand de biens), l’AMF impose que des règles strictes soient mises en œuvre par la SGP (exemple : niveau de diversification suffisant des sources d’investissement) ou que ces pratiques soient prohibées. Dans l’hypothèse de cibles provenant d’autres véhicules ou mandats gérés pour le compte de tiers par la SGP, l’AMF s’attend à ce que, lorsque ce type d’opération n’est pas exclu, la SGP ait mis en place des règles strictes afin d’encadrer ce type de transferts pour préserver l’intérêt des porteurs ou actionnaires de fonds immobiliers ;
  • concernant la répartition de cibles d’investissement entre sociétés ou véhicules gérés, l’AMF exige que ces dernières soient réparties de façon simple, en utilisant des critères clairement identifiés et définis le plus en amont possible de toute prise de décision (les modalités d’organisation de la SGP doivent permettre de préserver l’indépendance de chacun) ;
  • concernant la sélection des prestataires fournissant un service immobilier, l’AMF est attentive au fait que les SGP mettent en place une procédure de sélection des prestataires fondée sur des critères objectifs de sélection permettant une mise en concurrence. La procédure doit également prévoir une réévaluation des prestations fournies sur une base a minima annuelle.

La synthèse des contrôles SPOT réalisés sur cette thématique devrait permettre aux SGP immobilières de tirer profit des bonnes et mauvaises pratiques observées, afin de mettre à jour leur documentation et revoir leur organisation, le cas échéant.


[1] Nouveau format de contrôle plus court introduit par l’AMF en 2018.

[2] Position-recommandation AMF n°2009-23 portant sur la gestion des conflits d’intérêts dans les sociétés de gestion de portefeuille gérant des OPCI ; règlement de déontologie des OPCI approuvé par le Collège de l’AMF du 11 juin 2013.

[3] La position-recommandation AMF n°2012-19 portant sur le guide d’élaboration du programme d’activité des sociétés de gestion de portefeuille et des placements collectifs autogérés a étendu le champ d’application de cette position-recommandation à toutes classes d’actifs, y compris les SCPI.

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