Business Immo, le site de l'industrie immobilière

L’ordonnance sur la « suspension » des loyers : beaucoup de bruit pour rien ?

© Monster Ztudio / Adobe Stock

Parmi les nombreuses mesures que le gouvernement vient de prendre par 26 ordonnances en application de la loi d’urgence du 23 mars dernier, figure celle énonçant que certaines des entreprises dont l’activité est particulièrement affectée par la propagation de l’épidémie « ne peuvent encourir de pénalités financières ou intérêts de retard, de dommages-intérêts, d’astreinte, d’exécution de clause résolutoire, de clause pénale, ou de toute clause prévoyant une déchéance, ou d’activation des garanties ou cautions, en raison du défaut de paiement de loyers ou de charges locatives afférents à leurs locaux professionnels et commerciaux ».

En application de la loi du 23 mars dernier, dans les limites de laquelle le gouvernement a été habilité à prendre cette ordonnance, cette mesure ne doit normalement bénéficier qu’aux microentreprises au sens du décret du 18 décembre 2008, à savoir les entreprises qui occupent moins de dix personnes et ont un chiffre d’affaires annuel ou un total de bilan n’excédant pas 2 M€.

En résumé, le bailleur d’une microentreprise dont l’activité est affectée par la propagation de l’épidémie, ne peut désormais plus exercer aucune sanction contre son locataire en cas de défaut de paiement tant des loyers que des charges.

Cette mesure concerne les sommes exigibles « entre le 12 mars 2020 et l’expiration d’un délai de deux mois après la date de cessation de l’état d’urgence sanitaire déclaré par l’article 4 de la loi du 23 mars 2020 » et s’applique donc pour une partie des échéances de loyer du 1er trimestre 2020, ainsi que pour l’intégralité des appels de loyers au titre du 2e trimestre 2020.

Les loyers et charges restent exigibles et donc dus par les locataires, mais ne peuvent plus être recouvrés de manière forcée.

Il n’est donc pas question d’annuler ou de réduire les dettes locatives des entreprises concernées, mais « simplement » de permettre aux microentreprises de bénéficier d’un délai de paiement jusqu’à la fin de l’état d’urgence sanitaire.

Il s’agit d’améliorer temporairement la trésorerie des microentreprises afin d’éviter leurs dépôts de bilan immédiats.

Concernant les autres entreprises, aucune mesure législative ou réglementaire n’est prévue pour le paiement de leurs loyers et charges.

Le gouvernement a au contraire rappelé la nécessité pour les entreprises, notamment les plus grandes, de respecter leurs délais de paiement auprès de leurs fournisseurs (comme par exemple les bailleurs), à défaut de quoi elles ne pourraient avoir accès à la garantie de l’État pour leurs crédits bancaires.

Cet outil mis en œuvre par le gouvernement est donc assez limité, tant concernant les entreprises pouvant en bénéficier que s’agissant des mesures prises.

Le gouvernement compte sans doute sur des accords interprofessionnels entre les bailleurs et les locataires ou sur des engagements pris de manière individuelle par des foncières pour venir en aide aux locataires qui ne correspondent pas à la définition des microentreprises.