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Par Johanna Capoani, Swiss Life Asset Managers France

À la veille des vacances d’été, quelles perspectives pour le segment hôtelier ?

© bgton / Adobe Stock

Au sortir de plusieurs vagues de confinement et face au relatif reflux de l’épidémie de Covid-19, les perspectives de l’immobilier hôtelier sont engageantes à l’échelle de l’Europe. Le rebond risque néanmoins d’être différencié, entre une reprise rapide pour le tourisme de loisirs et une trajectoire plus sinueuse pour le tourisme d’affaires. Tour d’horizon à la veille des vacances d’été.

Avec des conditions sanitaires offrant davantage de visibilité, le tourisme de loisirs devrait rebondir assez vivement dès cet été. La campagne de vaccination de masse dans les différents pays d’Europe, la réouverture récente des frontières intracommunautaires et la tendance à l’harmonisation des règles sanitaires et conditions d’entrée des voyageurs sur les territoires nationaux, constituent d’importants soutiens pour l’hôtellerie de loisirs. Cela marque d’ailleurs une évolution majeure avec la situation observée à l’été 2020, lorsque les flux touristiques étaient restés essentiellement intranationaux au regard de contextes et protocoles sanitaires hétérogènes, d’un pays à l’autre.

Un phénomène de « revenge travel »

À l’image des différents secteurs de la consommation, il faut s’attendre à un phénomène de « revenge travel », autrement dit de rattrapage puissant après 18 mois marqués par les restrictions et donc une sous-consommation de voyages. Cette trajectoire est déjà perceptible dans les statistiques comme l’illustrent les très bons taux de réservation enregistrés par les opérateurs hôteliers espagnols sur les destinations loisirs, traditionnellement très dépendantes d’une clientèle internationale, pour cet été.

Outre les destinations touristiques estivales les plus prisées, la reprise semble d’ores et déjà profiter aux grandes métropoles européennes, traditionnellement appréciées pour les courts séjours jours qualifiés de « city breaks ». Après les pauses au gré des confinements en 2020 et début 2021, Paris, Rome, Barcelone, Amsterdam ou Berlin retrouvent leur rang de destinations phares tandis que d’autres métropoles, comme Séville, gagnent du terrain. Le retour des touristes européens dans ces métropoles bénéficie à l’hôtellerie urbaine de centre-ville. 

Une autre tendance significative : le regain d’intérêt pour l’hôtellerie de plein air. Le segment du camping a tiré son épingle du jeu en 2020 au regard du contexte sanitaire, avec une chute de l’ordre de 20 % du chiffre d’affaires pour les campings français qui a particulièrement touché ceux très dépendants d’une clientèle domestique, tandis que l’ensemble des acteurs de l’hôtellerie voyait son chiffre d’affaires diminuer de 60 à 80 %. Les réservations sont de plus reparties à la hausse en 2021.

Le marché français, premier marché émetteur et récepteur de flux touristiques sur le camping en Europe (et deuxième au monde !), devrait être le principal bénéficiaire du rebond. La réouverture des frontières va notamment faciliter le retour de touristes transfrontaliers (Suisses, Italiens, Allemands, Belges) dans les établissements français. Sans compter l’afflux de néophytes ayant découvert l’art du camping à l’été 2020 quand la situation sanitaire incitait plutôt à ce mode d’hébergement plus libre, à ciel ouvert, à bonne distance sociale et dans des lieux au sein d’espaces naturels ! Le cru 2021 pourrait donc être celui de la fidélisation de cette nouvelle clientèle.

Une classe d’actifs cyclique, soutenue par des facteurs structurels

Cependant, il est plus difficile d’avoir une telle visibilité concernant l’hôtellerie dédiée au tourisme d’affaires. Il existe une forme d’inertie liée en partie à la haute efficacité des systèmes numériques de « télé-réunions », visioconférences et de travail à distance, freinant la reprise des voyages d’affaires. À ce facteur infrastructurel et logistique en matière de communication s’agrège évidemment une lecture pragmatique des directions d’entreprise : à l’épreuve de la crise sanitaire, celles-ci pourraient être plus sélectives dans le déploiement de budgets dédiés aux déplacements des collaborateurs. Pour ces raisons, il faudra probablement 12 à 18 mois pour un retour de l’activité de tourisme d’affaires à un niveau normatif pré-crise.

En tant que classe d’actifs, l’immobilier d’hôtellerie affiche aujourd’hui un point d’entrée relativement intéressant alors que se dessine la sortie de crise sanitaire. Les investisseurs doivent néanmoins être conscients de la dimension cyclique de son comportement, ce qui peut générer des séquences de volatilité. L’hôtellerie nécessite une approche d’investissement sur le temps long. Soutenus par des tendances structurelles – avec l’essor de classes moyennes mondiales qui voyagent de plus en plus –, ces actifs sont en mesure de délivrer des rendements potentiellement supérieurs au taux d’inflation à horizon dix ans.