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Quand les fonds souverains se font vautours

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Après le Qatar, Abu Dhabi. Le fonds souverain Adia signe très certainement la transaction de l'année avec la reprise des derniers actifs immobiliers des Docks Lyonnais. L'autorité de la concurrence a donné son blanc seing, le 14 août dernier, pour un deal qui devrait friser les 750 M€ à en croire le Figaro. Pas sûr que Beaugrenelle batte le record, sauf à surenchérir sur l'offre la plus forte du premier tour qui atteindrait les 720 M€. Ni même que la vente du portefeuille français de Risanamento - un dossier autour du milliard - se conclut avant la fin de l'année.

Cette opération marque, peut-être, un changement d'époque dans l'investissement immobilier, à défaut d'un réel retournement de cycle. C'est d'abord la fin de l'âge d'or d'une génération de fonds opportunistes anglo-saxons, notamment ceux qui ont brillé juste avant la chute de Lehman Brothers. Les Docks Lyonnais, avant d'être repris par un fonds géré par UBS, était une foncière cotée qui a fait ses emplettes au plus fort de l'effervescence du marché de l'investissement immobilier. Une foncière emmené par Miles d'Arcy Irvine, celui qui a été la tête de pont des fonds Whitehall au milieu des années 90.

Cette transaction est la confirmation de l'omnipuissance des fonds souverains. Du Moyen-Orient évidemment, avec le Qatar et Abu Dhabi en tête de gondole, mais aussi d'Asie et notamment de Chine si Safe et son asset manager Ginkgo emportent la mise sur le centre commercial Beaugrenelle, ou encore d'Europe avec Norges Bank qui se positionne maintenant sur la dette immobilière. Des fonds qui adoptent donc des stratégies différentes. Si le Qatar a animé le marché avec l'acquisition des plus beaux trophy assets, Adia se positionne sur des dossiers beaucoup plus opportunistes. Limite distressed même.

Car, le deal Adia/Docks Lyonnais est aussi le reflet d'une partie du marché que l'on cherche à cacher pudiquement. Si le prix de 750 M€ se confirme, on acte clairement une baisse conséquente des valeurs vénales. Les acquisitions du 6/8 Hausmann à Paris, du Capitole à Nanterre (65 000 m2), des 19 000 m2 d'Antony Park ou encore de l'îlot Grolée à Lyon ont mobilisé près de 900 M€ d'investissement. En y ajoutant le siège de Bouygues Telecom à Issy-les-Moulineaux, acheté 484 M€ en 2007 du temps de la tour Mozart, revendu cette année un peu plus de 300 M€ à un fonds coréen sous l'appellation tour Sequana, on mesure les dégâts de la crise sur un portefeuille dont les qualités intrinsèques ne sont pas remises en cause.

Les Docks Lyonnais payent ainsi le prix du retournement du marché, peut-être amplifié par la guerre que se sont livrés son ancien fondateur et son actuel président Roderick Sloan. Adia, lui, malgré son silence assourdissant, s'est signalé par la reprise d'une partie de la rue de République à Lyon ou le 90 Pasteur près de la gare Montparnasse, et s'impose comme un acteur opportuniste sur le marché hexagonal. Ou quand les fonds souverains deviennent à leur tour des fonds vautours.

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