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Télé incognita

Le Parvis de La Défense © Xavier Lahache pour Business Immo

À mesure que se prolonge la crise sanitaire, gonfle l’inquiétude sur l’avenir des bureaux. Pas tant l’objet en lui-même, mais plus exactement l’avenir immédiat de ce marché. Les couloirs vides des sièges sociaux sont autant destructeurs pour les bureaux que les rues désertes pour les commerces. Et une fois tournée la page de la pandémie, rien ne dit qu’ils vont redevenir la fourmilière qu’ils ont pu être.

L’immobilier est un paquebot qui ne réagit pas comme un hors-bord. Stopper les moteurs ne vous arrête pas immédiatement. Donner un franc coup de barre ne vous fait pas virer de bord dans l’instant. Et les manœuvres sont encore plus délicates quand on ne maîtrise pas la météo. Ici, l’inconnue s’appelle le télétravail. Que certains annoncent comme un cyclone pour l’immobilier de bureau. Que d’autres se plaisent à n’y voir que quelques nuages à l’horizon. Une majorité d’acteurs avouant être dans le brouillard le plus complet sur la question.

Des premières études essayent de quantifier les impacts du télétravail sur la consommation de mètres carrés. L’IEIF les a synthétisées dans une étude qui montre clairement un effet déflationniste sur la demande placée, l’absorption nette et, in fine, sur le parc de bureaux en Île-de-France. Le scénario médian – celui où plus de 40 % des entreprises passeraient à deux jours de télétravail – entraîne un gain de surface de 27 %, une réduction du parc tertiaire de 3,3 millions de m² et une baisse de la demande placée annuelle de 14 %. Dans un scénario de « rupture » où le curseur du télétravail monte à 2,2 jours pour 54 % d’entreprises, les compteurs s’affolent : 36 % de gain de surface, 6 millions de m² détruits et une baisse de 24 % de la demande placée annuelle.

Le temps sera là aussi un facteur clé pour les acteurs immobiliers. Les entreprises doivent au préalable définir, puis implémenter leurs nouvelles organisations du travail. La longueur des baux, en particulier auprès des grands utilisateurs, protège également les bailleurs. Au total, il faudra dix ans pour mesurer pleinement les effets du télétravail sur le parc de bureaux francilien.

Mais une chose est sûre. Le marché des bureaux entame un nouveau cycle, structurellement déflationniste, dont la création de valeur future passera par une accélération de la transformation et de la modernisation du parc. Nous entrons dans un processus schumpétérien de destruction créatrice de valeur qui va réinterroger l’appréciation de la prime de risque.

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