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Point de vue de Jérôme Le Grelle, Convergences-CVL

[POINT DE VUE] L’immobilier commercial est-il compatible avec la copropriété ?

En immobilier commercial, la pleine propriété des murs est sans conteste la situation la plus adaptée à une gestion dynamique. À défaut, l’existence de copropriétaires freine dangereusement la mise à niveau continue de l’actif. Faut-il pour autant s’abstenir d’investir dans une copropriété ?

Dans les années 2000, la stratégie des foncières spécialisées a été de viser la pleine propriété de leurs centres, rachetant une à une les cellules qui ne leur appartenaient pas afin d’en contrôler la gestion et de procéder en temps utile aux investissements nécessaires.

Selon un modèle différent, plusieurs acteurs de la grande distribution ont créé des foncières avec des partenaires financiers pour porter leurs galeries marchandes. Leur stratégie est fondée sur un alignement d’intérêts : l’exploitant de l’hypermarché et le propriétaire de la galerie sont d’accord sur la stratégie de valorisation de leurs actifs, lesquels sont clairement complémentaires et forment un tout : le centre commercial. En toute logique, la gestion du centre commercial revient à la foncière, c’est-à-dire à une entité non suspecte de privilégier les intérêts de l’exploitant d’hypermarché, et dotée de toute l’expertise nécessaire.

Les foncières spécialisées, qu’elles soient d’essence immobilière ou issues de la distribution, préfèrent donc posséder les sites en totalité. Faut-il en déduire que tout investisseur doit éviter d’acquérir des actifs commerciaux en copropriété ?

De fait, nombre de sites restent des copropriétés ou le deviennent en cas d’arbitrage. La rareté de l’offre et le niveau élevé des prix conduit certains acteurs à s’en accommoder et à les acquérir. C’est prendre un risque supplémentaire, car la valeur de leur actif dépend alors non seulement de la qualité des locataires, ce qui est la règle en immobilier commercial, mais aussi des décisions de la copropriété quant à la stratégie de valorisation à adopter.

On ne saurait donc trop recommander, avant toute acquisition de cette nature, d’analyser en profondeur le fonctionnement de la copropriété : y a-t-il convergence d’intérêts entre les copropriétaires ? Comment les décisions sont-elles documentées, prises, mises en œuvre ?  

La meilleure garantie sera la présence d’un gestionnaire indépendant et compétent. Dans le cas contraire, l’acquéreur doit en faire une condition préalable à l’achat.

  • L’indépendance du gestionnaire est nécessaire pour éviter tout conflit d’intérêt : la gestion confiée à l’un des copropriétaires ou à l’une de ses filiales présente un risque de tension et de suspicion, notamment quand des décisions difficiles et coûteuses sont à prendre. Si c’est le cas, des règles strictes de gouvernance sont indispensables.
     
  • La compétence du gestionnaire, au delà des missions classiques du property management, implique notamment qu’il soit capable de mobiliser les partenaires autour d’une stratégie fédératrice de valorisation de l’actif, adaptée à son contexte particulier.

La copropriété est un facteur de risque important, qui doit être analysé en profondeur préalablement à toute acquisition. Son organisation et son mode de gestion sont des éléments cruciaux de cette analyse.